Jacqueline Merville, La vie bonne et d’autres vies
Les mises en abyme de Jacqueline Merville
Jacqueline Merville propose un livre puzzle où la narratrice tente de garder contact avec une amie restée au pays d’où elle revient (l’Inde) avant que cette sorte d’entretien soit troublé ou doublé par la présence chez la première d’un miroir où d’étranges figures se mettent en mouvement.
En une série de mises en abyme et dans une évocation où se mêlent l’échange de lettres entre les deux amies et l’histoire de la narratrice, tout s’imbrique en divers nœuds de différents et espaces là où la narratrice propose d’énigmatiques remontées au flux incertain autour de sa chambre.
Une telle fiction devient l’obsession d’une hantise de l’entrave dont la narratrice tente de se libérer pour vivre. Derrière la ligature entre les deux femmes, existe toujours ce que la pression du lien fait surgir. Le corps et sa psyché tentent de réparer le trauma infligé au féminin et de s’en séparer.
Il n’en demeure pas moins qu’en cette suite – telle qu’elle est représentée en multiples variations tragiques ou dérisoires – bien des choses demeurent ambiguës et inépuisables.
Les femmes, victimes ou abandonnées, semblent vouées à voir sans savoir, ou savoir sans voir. Mais tourner autour d’elles et entrer dans ce qu’elles (se) disent permet de discerner ce qui leur a échappé avant que se produise une sorte de résilience après diverses scènes (entre autres de viol) ou en passant à travers le miroir jusqu’à ce que des revenants finissent par se taire.
jean-paul gavard-perret
Jacqueline Merville, La vie bonne et d’autres vies, Editions des Femmes – Antoinette Fouque, Paris, octobre 2022, 160 p. – 15,00 €.