Mylène Vignon cultive le bon genre et le disruptif, la classe et ce qui fait bouger les lignes. Proustienne et amatrice d’Arrabal, elle unit leurs deux humours. Et elle sait qu’il existe au moins deux sortes de sucreries. Celles qui écœurent par abondance de glucides et celles qui — ne manquant pas de sel — font la folie du sage et du pas sage. Bref, elle reste de celles qui ne comptent pas pour des prunes même lorsqu’elles se font, comme une telle créatrice, mirabelles parmi les belles.
Dans un de ses textes — car elle est aussi poète — elle écrivait, à juste titre :“Allongée nue sur une tarte / En forme de sofa / Dans un parfum de volupté/ Vanillé /Je suis la prune/ Aux tendres vallons dorés / Bien sucrés”. Elle est bien prune de Cythère et son œuvre de plasticienne le prouve.
Chez elle, pas de grève de la faim, chemin de calvaire ou patères austères. Tout est bon afin de ne pas vivre face contre terre ‚sinon pour y chercher des fleurs du secret et des truffes — au chocolat bien sûr. Mais pas que.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Mon premier café vers 6h (pardon à mes voisins pour le doux son du marteau piqueur de la machine)
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Je ne cesse de les réaliser de jour en jour…
A quoi avez-vous renoncé ?
Mon mariage pour des raisons de difficultés de gestion affectives antinomiques avec les artistes
D’où venez-vous ?
Je viens d’un pays où l’on écrivait à l’encre violette avec des pleins et des déliés, un pays où le dictionnaire ne s’appelait pas Google, un pays qui pourrait se nommer Youkali.
Qu’avez-vous reçu en “héritage” ? L’Art
Un petit plaisir — quotidien ou non ? L’art, encore
Comment définiriez-vous l’érotisme de vos collages ?
Je ne le définis pas, car il existe tout simplement quelque part en moi, dixit mes lecteurs et amis
Quelle influence les théories littéraires (ou autres) ont sur lui ?
Elles sont liées
Quel poids représente le passé dans votre oeuvre ?
Plutôt qu’un poids, c’est surtout la musique de mes souvenirs les plus heureux qui me guide
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Celle de ma marraine, chanteuse lyrique, penchée sur mon berceau
Et votre première lecture ?
Étrangement, à 8 ans j’avais trouvé dans la bibliothèque de mes parents ” L’Amant de Lady Chatterley”! Je n’y comprenais rien du tout, mais j’adorais le passage où le monsieur déposait des fleurs sur la toison de la dame… c’était une jolie image
Quelles musiques écoutez-vous ? Mozart en boucle
Quel est le livre que vous aimez relire ? Proust, “La Recherche du temps perdu“
Quel film vous fait pleurer ?
“Le vieux fusil” de Robert Enrico
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi façon Andy Warhol.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Personne! J’ai même envoyé une lettre au Pape à propos de Marie-Madeleine
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Balbec.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
George Sand, Jacques Prévert, Colette, Sarah Bernhardt, Judith Gautier
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Encore une belle carte de Fernando Arrabal.
Que défendez-vous ?
L’art contemporain émergent, sous toutes ses formes (Saisons de Culture existe pour eux)
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Je confirme !!!
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
J’adore !
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Mes projets : un Leporello à paraître en octobre aux Éditions Cahiers du Temps, sur un poème de George Sand, “Aurore”.
Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret, pour lelitteraire.com, le 7 septembre 2023.
(photo de l’artiste par Woytek Konarzewski)