N’allez pas croire qu’à Limoges il ne se passe rien…
Si les disparitions sont nombreuses, quelque 45 000 fugues et 9 000 absences plus inquiétantes (les chiffres datent d’avant 2010 année de parution du présent roman en grand format), une quantité importantes le sont volontairement pour changer de vie.
À partir d’un départ dont on ignore s’il est voulu ou imposé, le romancier propose une enquête suffisamment noire, avec le suspense induit pour la rendre attractive, intéressante à découvrir.
Chantal Frugier est enlevée à la sortie du lycée où elle enseigne les lettres un vendredi soir.
L’inspecteur Franck Dumontel veut arroser le premier anniversaire de sa mutation à Limoges, sa ville natale, après une carrière épuisante dans le 6e arrondissement de Paris.
Michel Frugier, brocanteur de son état, est inquiet. Il sent que Chantal, qu’il aime comme au premier jour il y a vingt-cinq ans, se détache, leurs relations se détériorent. Aussi le samedi matin, il rencontre Dumontel, de permanence, pour signaler la disparition de son épouse. Or, l’inspecteur ne peut rien faire, la police ne pouvant réagir immédiatement face aux disparitions de personnes majeures.
Robert Couturier, retraité, se lève tôt pour aller pêcher, sa principale occupation quel que soit le temps. Quand il arrive près de la cascade du lac d’Uzurat, une pièce d’eau créée artificiellement, il découvre un visage blafard, des yeux qui semblent implorer.
Franck, sur les lieux, trouve une ressemblance avec Chantal Frugier, les deux femmes étant rousses toutes les deux. Il pressent un lien et il va s’impliquer dans la recherche de l’enseignante, malgré le peu d’éléments, jusqu’au moment où il se fait piéger, accusé de meurtre…
On retrouve Franck Dumontel, le héros de La cinquième victime (J’Ai lu n° 13 368), toujours aussi mal dans sa peau, toujours aussi sensible à son environnement. Ce flic sur le retour, la cinquantaine bien sonnée, aux cheveux longs, est confronté quotidiennement, depuis vingt-cinq ans, à la misère, la violence, l’exclusion, la détresse, le drame, le sang et les larmes.
Mais il sait aussi être sensible aux arômes, aux textures, aux bouquets de vins qu’il consomme régulièrement, aux plats qu’il déguste quand l’occasion se présente.
Il a une vie sentimentale perturbée : toujours marié avec Marie, qu’il retrouve de temps à autre, il est parti vivre à Paris avec Elsa qui l’a largué, occasionnant sa demande de mutation. Limougeaud de naissance, le romancier fait découvrir, sur les pas de son inspecteur préféré, sa ville en décrivant rues et lieux remarquables.
Il intègre dans l’enquête nombre de références tant musicales que littéraires, tant cinématographiques que culinaires. Il place quelques réflexions pertinentes comme celle relative à la découverte tardive qu’un confort, même routinier, peut avoir du bon.
Franck Linol est proche de son personnage. Ne portent-ils pas le même prénom, les cheveux longs ?
L’auteur propose un récit avec une intrigue soignée où l’on retrouve avec intérêt son inspecteur désabusé mais pugnace.
serge perraud
Franck Linol, Rendez-vous avec le tueur, J’Ai Lu n°13 663, coll. Policier, janvier 2023, 256 p. — 8,50 €.