Dans une Irlande du Nord où la fracture religieuse est encore très forte, Sam Millar installe une chasse à l’homme où plusieurs parcours vont se croiser. Il met en scène un groupuscule indépendantiste irlandais qui n’accepte pas de se voir voler, bien que les fonds en question aient une provenance douteuse. Il active un tueur méthodique dont les motivations, à part celle de gagner sa vie en ôtant celles d’autres, restent obscures.
S’ajoute un homme ambitieux, avide de vengeance qui veut gommer l’affront que des petits voyous lui ont fait et qui désire gagner des places dans la hiérarchie du groupuscule. Des policiers aux liens étroits avec la pègre, un enquêteur qui veut partir la tête haute complètent le tableau de tous ceux qui sont aux trousses de trois malfrats qui vont devenir une cible parfaite.
Stefen Garland et Grace, son épouse, sont tués dans la nuit par le jeune garçon qui a pris l’arme de service du policier.
Charlie, Jim et Brian, déguisés en loups car c’est Halloween, attendent dans une vieille voiture le moment proche de la fermeture pour braquer la Bank of New Republic. Ils entrent sans problème mais tombent sur des coffres vides. Alors que la police, prévenue par un témoin extérieur, arrive, ils s’enfuient. Brian s’est emparé de la valise d’un client qui leur a tenu tête et qu’il a dû assommer.
Dans le quartier général de la police de Belfast, Harry Thompson, inspecteur principal de la section Crimes graves, est à moins d’un mois de la retraite. Il veut laisser une ardoise vide à son successeur.
Dans leur planque, Brian a ouvert la valise et découvert… un demi-million ! Autour de Conor O’Neill, un des membres fondateurs de la Fraternité pour la liberté irlandaise, trois hommes constatent le désastre. L’un d’eux, Seamus Nolan, s’est fait voler sa valise par les pilleurs de banque.
Rasharkin, un collectionneur de comics est aussi un tueur. Il est contacté par Conor pour retrouver les voleurs et l’argent. Mais Seamus Nolan, humilié, veut se venger et part sur la piste de ceux qui l’ont dépouillé…
Sur fond de meurtres politiques et/ou crapuleux, Sam Millar construit une intrigue forte aux ressorts puissants. Il place ces personnages dans un cadre politique bien tourmenté et libère les passions les plus dévorantes. Sa galerie d’intervenants est étoffée et comporte le pire, surtout le pire, dans une ambiance noire où la férocité est de mise.
L’Irlande et son passé douloureux, avec ses plaies toujours à vif, occupe une belle place, explique certains des comportements des personnages du roman.
L’auteur allège cette atmosphère lourde avec nombre de références touchant au cinéma et à la bande dessinée. Il donne, à deux de ses personnages, la passion pour les comics et leurs auteurs. Rasharkin est un fan des illustrés américains, surtout ceux du dessinateur Harmenszoon, un créateur visionnaire à ses yeux. Le romancier retient, pour patronyme de ce créateur, le second prénom de van Rijn, mondialement connu sous le nom de… Rembrandt.
Il place également nombre de références au cinéma policier jouant avec des répliques cultes, des comparaisons audacieuses. Le tout est teinté d’humour, un humour noir, voire très noir.
Une fois encore Sam Millar signe un polar singulier, dense, rythmé, avec une intrigue qui prend en compte le cadre et ses tourments, servie par un groupe de protagonistes qui s’impose au lecteur de diverses façons.
serge perraud
Sam Millar, Un Tueur sur mesure (The Bespoke Hitman), traduit de l’anglais (Irlande) par Patrick Raynal, Métailié, coll. “Bibliothèque Anglo-saxonne”, octobre 2021, 288 p. – 21,50 €.
Merci beaucoup, Serge.
Thank you for your kind words for my new novel.