Jim & Laurent Bonneau, L’Étreinte

Une expé­rience réus­sie et un bel appel à la vie

Cet album est inno­vant dans sa démarche de concep­tion.
Les auteurs ont retenu une approche créa­trice peu com­mune pour explo­rer une autre manière de réa­li­ser une bande des­si­née où l’écriture, tra­di­tion­nel­le­ment, pré­cède l’image.

Un pré­am­bule raconte la décou­verte, par Ben­ja­min, un sculp­teur, de la photo d’une femme éten­due sur la plage. Il a pris ce cli­ché par reflexe. Il fait cette décou­verte alors qu’avec Romy, sa com­pagne et modèle pré­féré, ils reviennent de Cava­lés, juste avant qu’une voi­ture vienne per­cu­ter vio­lem­ment la leur. Deux jours plus tard, il est à l’hôpital où Romy est en soins inten­sifs alors que lui n’a que quelques bles­sures légères. C’est le défilé des parents, amis avec des mots ras­su­rants. Mais les jours passent… Il se sou­vient de leur pre­mière ren­contre, de l’amour qu’ils ont par­tagé et de leurs pro­jets.
Ben­ja­min est sculp­teur et il doit assu­rer une expo­si­tion qui sera impor­tante pour la suite de sa car­rière. Romy est tou­jours dans le coma. Pour conti­nuer à vivre, il repense à cette femme sur la plage et décide de la recher­cher.
Mais com­ment retrou­ver une femme prise en photo il y a quelques semaines sur une petite plage…

Cela fai­sait plu­sieurs années que Jim et Laurent Bon­neau avaient envie de tra­vailler ensemble mais trou­ver une voie com­mune n’est pas facile. C’est quand le des­si­na­teur a réa­lisé quelques planches autour d’un sculp­teur qu’un déclic s’est pro­duit.
Cet album est un jeu de déra­pages constants plus ou moins contrô­lés, un numéro d’équilibriste construit en fonc­tion des réac­tions de l’un et l’autre par rap­port au tra­vail de son par­te­naire. Cela a été un va-et-vient constant entre des­sin et écri­ture, l’un ins­trui­sant l’autre et vice-versa. “Nous avan­cions simul­ta­né­ment en fonc­tion de ce que pro­po­sait l’autre.

Et il en résulte un résul­tat stu­pé­fiant, le résul­tat d’une osmose de créa­tion entre deux auteurs au som­met de leur art, capables de trans­cen­der la pen­sée, la per­cep­tion de l’autre. Il en res­sort un récit de 290 planches. Seules dix sur les trois cents réa­li­sées n’ont pas trouvé leur place.
On retrouve les idées fortes que Jim aime à déve­lop­per, l’idée du couple, l’idée d’une fusion entre deux êtres, la sen­sua­lité et les élans des corps. C’est éga­le­ment la recherche d’un absolu, d’un éden dans l’accord, les rap­ports entre les femmes et les hommes, les désirs et les attentes des unes et des uns n’étant pas sou­vent les mêmes.

Laurent Bon­neau qui assure des­sin et cou­leurs directes livre des planches magni­fiques, des cadres osés, des pers­pec­tives en lien avec des décors, des atmo­sphères et une mise en page à la fois dyna­mique et atten­tiste. Avec le nombre de planches, il a toute lati­tude pour don­ner des séquences tout en retenu, comme le muris­se­ment de la réflexion avant une déci­sion radi­cale.
Avec L’Étreinte, Jim et Laurent Bon­neau pro­posent un récit magni­fique, narré à la pre­mière per­sonne, porté par un per­son­nage très atta­chant et un gra­phisme hors norme.

lire un extrait

serge per­raud

Jim (scé­na­rio) & Laurent Bon­neau (des­sins), L’Étreinte, Bam­boo, label “Grand Angle”, juin 2021, 312 p. – 29,90 €.

 

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Filed under Bande dessinée, Beaux livres

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