Ce one-shot vient clore les aventures de Chen Long, le héros de la série Chinaman, neuf tomes parus entre octobre 1997 et septembre 2007.
Il fut l’un des meilleurs combattants des Triades chinoises, mais aujourd’hui il n’est plus qu’un vieil homme usé, dévoré par les regrets et l’opium.
En Californie, deux ouvriers mexicains découvrent le cadavre d’une jeune fille. Le sherif identifie une des filles du banquier Kelley quand arrive deux Pinkertons. Wheeler, le chef, demande à Matt Monroe, un jeune agent recruté depuis peu, de prévenir la famille.
Le Dr Monroe, le père adoptif de Matt, s’inquiète auprès de Wheeler des nombreux enlèvements dans la région.
À quelques lieux de là, deux hommes se bagarrent parce que l’un d’eux veut coucher avec leur jeune prisonnière. Celle-ci se défend et parvient à quitter la cabane. Elle trouve Marcus qui ramène un Chen Long inconscient. En voulant la défendre contre ses poursuivants, Marcus est tué et Chen, réveillé, est blessé à la tête. Les coups de feu attirent une troupe qui alerte les Pinkertons.
Après quelques palabres, ils décident de se lancer sur la trace du kidnappeur survivant. Pour venger Marcus, Chen décide de les suivre. C’est lors d’une empoignade avec les Pinkertons, quand l’un d’eux traite Chen de lâche que celui-ci découvre un médaillon tombé sur le sol, le portrait d’Ada, la seule femme qu’il a aimée. Ce médaillon est la propriété de Matt…
Avec Chinaman, Serge Le Tendre donne le parcours d’un mercenaire, un tueur au service des Triades, venu mettre au pas celle qui officie en Californie. Mais, il s’affranchit très vite de leur emprise retrouvant son autonomie, autonomie relative car il est rejeté par sa communauté et en butte au racisme antichinois qui se développe dans ce milieu du XIXe siècle.
Chen ne s’est pas remis des actes qu’il a dû accomplir lorsqu’il a été enrôlé de force dans l’armée de l’Union. C’est pour venger la mort de Marcus, son seul ami, qu’il repart sur le chemin de la violence, une violence qui ne cesse jamais.
Serge Le Tendre entremêle différents thèmes pour construire son intrigue. Outre cette quête de vengeance qui anime au premier chef le héros, c’est la découverte d’une paternité ignorée, l’émergence de la folie de l’or noir après celle de l’or tout court, le racisme qui s’exerce sur les communautés chinoises à cette époque.
Afin de donner un attrait supplémentaire au scénario, l’auteur a voulu mettre en scène un fils adulte, ce qui a contraint à vieillir le héros de belle manière, mais permet des interactions musclées plus cohérentes.
Le dessin d’Olivier TaDuc est traditionnel, réaliste, d’une belle qualité. Cependant, depuis les albums de la série, son dessin est plus noir, dramatique, en tension. Il soigne, avec la même attention ses personnages, les décors et les objets usuels du quotidien. Ses personnages sont si bien typés qu’ils sont facilement identifiables. Les décors de l’Ouest américain sont parfaitement restitués. Il donne ainsi une belle image du Far West.
Le réveil du tigre clôt de façon admirable une série de haute tenue pour sa description d’une partie du territoire américain autrement que par l’œil d’un John Wayne.
serge perraud
Serge Le Tendre (scénario), Olivier TaDuc (scénario, dessin, couleur) & Luc Perdriset (couleur), Le réveil du tigre, Dupuis coll. “Aire Libre”, janvier 2021, 136 p. – 28,95 €.