Quand l’Aventure et la Science font bon ménage
Dans l’océan Pacifique, en 1848, un équipage d’une baleinière est sauvé d’une maladie mortelle par la médecine d’indigènes d’une île inconnue. De nos jours, à Mourmansk, le commandant à la retraite d’un « Typhon » regarde partir son sous-marin réaménagé pour la contrebande. En Chine, un représentant du ministère de la Santé vient sortir le Dr Song Lee de son exil. Éminente virologue et épidémiologue, l’Etat a besoin d’elle car une menace est née dans une région écartée du nord. Elle est envoyée, dans le cadre d’une coopération avec les USA, à Bonefisch Key en Floride. Là, sous la direction du Dr Max Kane, des équipes travaillent, dans le plus grand secret, sur des organismes marins plus particulièrement sur une espèce rare dite La Méduse bleue.
Joe Zavala, pour renouveler l’exploit, a reconstruit la bathysphère mythique de William Beebe, un biologiste qui, en 1930, est descendu à 920 mètres de profondeur. C’est ce biologiste qui a fait naître, chez Kane, sa vocation de microbiologiste marin, influencé par Beebe. Il veut donc être de l’aventure. Alors qu’ils atteignent la profondeur du record, une ombre géante se profile et la bathysphère tombe en chute libre. Toutes les communications coupées avec la surface, elle s’enfonce dans un fond vaseux qui bloque les systèmes de remontée. Kurt Austin se porte au secours de son ami. Un robot télécommandé, à l’approche des naufragés, ne répond plus. Il utilise alors un scaphandre de plongée à atmosphère. Mais, tandis qu’il réussit à crocher la bathysphère, il est attaqué à son tour. Sauvés, Kurt et Joe tentent de remonter la piste de leurs assaillants. Le Dr Kane rentre aux USA où sa piste se perd. Les triades chinoises entrent en scène sous couvert d’une société de pêche. Un laboratoire sous-marin disparaît et une terrible épidémie menace. Kurt Austin et Joe Zavala se retrouvent en première ligne pour tenter de déjouer les desseins sinistres qui se profilent…
Clive Cussler, et ses différents co-auteurs, explorent, sous couvert de romans d’aventures débridées, tous les aspects de l’univers marin. Avec Méduse bleue, ils abordent les fantastiques potentialités médicales qu’offrent les organismes marins. Il semble que cet univers ouvre la voie vers une importante source de produits pharmaceutiques. Elle commence à être explorée intensivement depuis que la canopée amazonienne a livré presque tous ses secrets. Pour évoquer ce domaine, les auteurs mettent en scène un début d’épidémie à haut risque et rappellent celles qui ont ravagé l’humanité. Ils évoquent ainsi les pandémies de peste, la grippe espagnole qui fit, en 1918–1919, plus de morts que la Grande Guerre… Ils décrivent également les recherches très discrètes, en laboratoire, sur de nouveau virus, de nouvelles armes biologiques. Or, Clive Cussler s’appuie toujours, pour la base de ses intrigues sur des assertions authentiques, des sources avérées.
Une fois encore les auteurs confrontent leurs héros à des Chinois exécrables. Ceux-ci sont de plus en plus retenus par les auteurs de romans d’aventures, d’espionnage, comme les ennemis à combattre. Ce choix relève-t-il d’une situation de fait ou d’une stratégie de communication ? Est-ce le révélateur d’une évidence politico-économique car la lutte à laquelle se livrent les deux puissances pour la suprématie dans le Pacifique, voire sur la planète entière, est réelle.
Outre ces aspects scientifiques ou politico-économiques, les auteurs restent fidèles à leur ligne de conduite et proposent un roman d’aventures véritablement mouvementées, riche en combats de toute nature avec une intrigue structurée qui mène à une conclusion presque apocalyptique. On retrouve, dans ce livre, tous les personnages qui structurent la série et nombre de liens avec les autres séries de l’auteur. Dirk Pitt, devenu directeur de la NUMA, fait une courte apparition, comme l’amiral Sandeker devenu depuis vice-président du pays. D’autres personnages, croisés lors de précédents romans, font un passage, tissant, ainsi, une unité et une cohérence entre les diverses facettes de l’œuvre. Si les moyens humains sont toujours efficaces, les moyens matériels sonteux aussi à la hauteur de l’intrigue avec une grande variété technologique.
Méduse bleue ne déroge pas à la règle fixée par les auteurs : un roman dépaysant, tonique, dynamique et passionnant avec des personnages taillés sur mesure.
serge perraud
Clive Cussler, Paul Kemprecos, Méduse bleue, Grasset, coll. “Grands Formats”, octobre 2012, 396 p. — 21, 50 €.