Amères thunes de Jacques Cauda
A ceux que la langue cruelle de Cauda gêne, il est conseillé la lecture de son dernier recueil. Fidèle à l’économie de la collection de Danielle Berthet, ne demeurent du corpus que ses notes. Nul risque de “gouâtre” — même si le mot tel un cafard devient la sécrétion naturelle d’une des notes de bas de page. Dans la frugalité de ce nouveau genre littéraire, Cauda fait preuve néanmoins de haute culture.
D’autant qu’agir irrationnellement comme l’impose la notule (où du compas du texte ne demeure que la jambe courte) mérite réflexion. Celle-là doit illuminer l’obscurité d’un texte ignoré.
A n’en pas douter, il possède sa force d’horreur et d’énormité. Cauda en laisse des indices, ramenant à l’horreur du supplice du scaphisme, à une béance ou plutôt un “orifice dégradé” qu’un tel martyr engage au sein d’un tonneau qui n’est plus celui des Danaïdes mais celui des monstruosités sadiques.
D’où ce jeu irrésistible entre deux formes incomplètes en quête l’une de l’autre. Le texte restera donc un horizon confus et lointain dont la rosée de son bas de caisse mouille l’esprit et le réveille pour comprendre, par ce qui n’est pas, ce qu’il en est d’une de ces horreurs dont l’Eventreur a le secret, là où “la grosse” restera hermétique.
Preuve qu’il ne suffit pas toujours de connaître l’amère pour y naviguer. Il suffit de suivre le bord de l’abîme afin de trouver l’endroit où “l’héroïne de l’épouvante est prise au garrot”.
jean-paul gavard-perret
Jacques Cauda, La grosse et les cabots, Danielle Berthet, collection Apostilles, Aix les Bains, 2019.