L’œuvre de Claudia Huidobro se caractérise par une évidente beauté formelle qui se manifeste notamment par l’utilisation de décors frisant l’énigme. Celle qui fut l’égérie des plus grands photographes (notamment de Jean-Paul Gaultier) développe une recherche qui interroge le culte de la beauté et de la féminité à la fois à travers la photographie, le photomontage , le dessin et la performance. Dans sa série « Tout contre », réalisée dans un château du sud de la France, le corps envahit l’espace. Celui-ci semble ne plus pouvoir le contenir.
Le tout en un humour discret, à la fois inquiétant et bienvenu. Il dénote la maîtrise de la créatrice dont le délire imaginaire est toujours contrôlé aussi bien dans ses scénographies du corps que dans les assemblages des objets et signes de la féminité : peignes, pinces à cheveux, rouge à lèvre, mais aussi scalpels, pages déchirées de magazines, photos de chevelures, mains séductrices. L’agrandissement démesuré, pris hors contexte, transforme les ensembles en un arsenal qui sort de l’utilitarisme de tels poses ou objets. Manière là encore de réviser le statut de la féminité.
Existent là parfois un cirque d’antipodistes et des jungles d’objets hirsutes. Tout est méticuleusement structuré, l’univers est fantasmagorique . Il « claque » visuellement là où la photographe invente un concept d’espace-temps élastique. Le contexte l’est tout autant. La plasticité est dégagée de toute propension psychologisante afin de laisser le champ libre à la fantaisie et à une séduction où la femme sort du « cadre » dans lequel beaucoup se réduisent à l’enfermer.
jean-paul gavard-perret
Claudia Huidobro, Faite main (Hand made), FIAF Gallery, New-York, du 24 septembre au 13 octobre 2018 (exposition)