La potion magique de la poésie n’a rien d’un Viagra mystique
Ce livre est une sorte d’hommage au « Soleil-Papillon » de la parole poétique : celle qui est aussi complexe que légère, multiple qu’une. L’auteur l’illustre à travers des poètes occidentaux et orientaux : Tagore, Valéry, Bonnefoy, Fouad Gabriel Naffah, Claudel ou Gracq sous l’ombre tutélaire de Mallarmé le flamboyant, celui qui plus que tout autre réveille l’esprit même lorsqu’il jouxte « avec le rien, le degré juste au-dessous du peu ».
Pour Salah Stétié, la poésie nous sort de l’état de prisonnier et de victime car elle permet de trouver des chemins de hallage marqués du sceau du devoir de connaître face aux sensations paniques ou extatiques de la vie. Tout autant — et en miroir au désir (enfantin ?) d’absolu qui construit tous les faux-sens en le clivant sur la spiritualité basique -, l’auteur prouve que la potion magique de la poésie même dans ses propensions les plus hautes n’a rien d’un Viagra mystique. Et Stétié précise comment la poésie ouvre le langage et l’être sur ses abîmes et parfois ses clartés.
Le livre fait sauter les carcans et les jougs à l’aide de « modèles » qui décorsètent le logos admis des sociétés. Ils touchent à notre plaisir comme à nos possibilités d’angoisse puisque nos certitudes se voient interpellées par leurs incursions intempestives. Soudain, ce que nous prenons pour l’impensable change notre manière de voir en faisant la nique « aux fils du désert absolu de l’être » qu’on nomme faute de mieux le hasard.
La poésie arrose ce désert, l’habite d’une fête. Stétié ne cesse de la créer jusque dans ses œuvres les plus graves au nom de l’amour qui est son « inspirateur originel (…) où vient boire la parole ».
jean-paul gavard-perret
Salah Stétié, Lapidaires verdoyants, Fata Morgana, Fontfroide le haut, 2017, 208 p. - 24,00 €.