Quand des lettres anonymes vous empêchent de tourner la page
Et si tout ce qui faisait votre vie basculait dés que vous ouvriez votre boîte aux lettres ? Et si l’initiale qui signait ces terribles lettres correspondait à celle de l’assassin de votre conjoint ? Que feriez-vous ? Laisseriez-vous votre vie partir en lambeaux, ou décideriez-vous enfin d’aller de l’avant, quelles qu’en soient les conséquences ?
Dix-huit mois que le mari de Saffron a été tué, sans que son meurtrier ait été retrouvé. Dix-huit mois écoulés comme un combat de boxe, où chaque geste du quotidien pourrait la mettre K.O. Saffron arrive tout juste à se relever, quand les premières lettres sont déposées chez elle. Toutes signées d’un A , elles pourraient être anonymes, et pourtant Saffron connaît l’identité de l’auteur, l’identité de l’assassin de son époux. Malheureusement pour elle, elle ne peut rien révéler sans mettre en péril sa famille une fois de plus. Et tout se complique encore, quand elle découvre le lourd secret que cache sa fille de quatorze ans. Saffron doit faire face seule, et agir avec subtilité si elle ne veut pas que A frappe à nouveau, même si ce combat s’avère être le dernier pour elle !
Signé A est un redoutable thriller psychologique. C’est le cinquième roman de Dorothy Koomson traduit en français, et son climat étouffant menace à tout moment de vous engloutir. Mais pour cela, il vous faudra tenir au moins une bonne centaine de pages. L’écriture de Dorothy Koomson met du temps à vous captiver. La romancière abuse des flashbacks, et le début peut paraître ennuyeux, et répétitif comme le quotidien morose de l’héroïne dépressive. Saffron vous entraîne en effet dans une spirale d’auto-apitoiement et de larmes qui fatigue réellement au début.
Rien ne va plus dans sa vie : deuil difficile à porter, harcèlement au travail, deux enfants en proie aux affres de l’adolescence, une tante capricieuse…et bien sûr ces lettres immondes qui la font plonger un peu plus de jour en jour…puis le miracle finit par opérer.
Alors qu’on se demande si le style de Dorothy Koomson ne va pas remplacer le plus efficace des somnifères, l’histoire prend une autre tournure quand son héroïne se réveille enfin (et nous réveille par la même occasion), en particulier en raison des problèmes que lui cause sa fille. Son personnage se révèle plus complexe que la veuve dont on dresse le tableau au départ, tout le monde dans son entourage devient peu à peu suspect, à se demander si sa paranoia n’est pas contagieuse. Le climat familial, amical, professionnel devient de plus en plus oppressant au fil des pages, et Saffron n’a d’autre choix que de réagir, de se montrer forte et digne de l’amour que lui portait son mari.
Et ce combat, que l’on croit perdu d’avance, va vous révéler des surprises jusqu’au round final, et faire de ce roman un bien meilleur thriller qu’il n’y paraissait au début. Alors, armez-vous de patience et le A qui signe ces lettres pourrait finalement devenir synonyme d’Attirance et d’Addiction plutôt que d’Amertume et Assoupissement !
franck boussard
Dorothy Koomson, Signe A, Belfond, 2016, 602 p. — 22, 00 €.