L’enfer n’est pas (forcément) les autres
Face à un monde qui demeure une obscurité qui se meut en tous sens, dans ses performances et « suspendu » à son corps, Andrea Bianconi le déchiffre. Et si le monde ne se souvient pas d’être né, Andrea Bianconi en réinvente des régénérescences.
Preuve que celui qui a du renoncer à devenir aviateur n’a pas pour autant abandonné tous ses rêves. La performance lui permet d’en réaliser de plus en plus. Et si, trop souvent, le réel avale, l’artiste, le digère de diverses manières. La création chasse ce qui est établi, le fait évoluer (pour le comprendre, il suffit de regarder chronologiquement les œuvres) parce qu’il y a toujours une autre vague à estamper ou à endiguer, une autre paroi à creuser.
Le corps regarde le monde et, par le mouvement de son regard (comme aussi celui qui se porte sur lui), l’artiste italo-américain dessine et colore l’univers. Ses propositions sont incessamment actives. Elles rappellent que le travail de l’art a commencé dans la nuit des cavernes mais qu’il reste ouvert à une poétique de l’instant d’apparition. Il matérialise l’inenvisageable.
L’œuvre glisse vers une sorte de défiguration. Partant de matières de base, l’artiste métamorphose les stabilités convenues, conventionnelles par « touches » volontairement d’approximations signifiantes. La force d’une telle pratique arrache toute mièvrerie mais en préservant la beauté, l’éros et la farce qui n’ont plus rien à voir avec ce que les médias proposent.
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jean-paul gavard-perret
Andrea Bianconi, You and Myself, Silvana Editoriale, Milan, 2016