« On ne peut être une bête brute sans un atome de méchanceté » : ce qui n’est pas le cas des animaux. Entre autres, les ruminants : « ils observent aussi bien à l’horizontale qu’à la verticale. Les passant n’ont pas de mystère pour les vaches, les chèvres ni les moutons – pour les girafes non plus » précise Andoche Praudel le « canard trouvé », comme le héros d’une de ses histoires. Mais l’auteur ne cancane pas pour rien même s’il feint le contraire.
Ses fables font l’homme tel qu’il est : faible. Et la femme au besoin se procure — non sans raison — d’autres amants. Quant à l’homme (le mâle), pour faire signe, il doit se maquiller en singe. Et plus souvent en taureau. Ce qui ne change en rien à l’affaire. Au contraire. Certes, les mères accusent leurs belles-filles de telles métamorphoses et d’avoir couché avec leur progéniture qui se refuse à l’inceste. Preuve qu’il n’existe pas seulement dans l’échelle des animaux des luttes fratricides. Le beau sexe n’est pas exempt de se manger lui-même pour soi-disant défendre une cause de bonne nature rendue caduque par des mésalliances. Les femmes perdent donc la tête. Mais les hommes eux manquent par trop de corps.
Que reste-t-il sinon la bête afin que l’humanité prospère au moment où le monde bascule des forêts mythiques au chaos du présent ? Longtemps la bête (entendons l’inverse de l’animalité) fut première : mais de plus en plus, des hommes, il en plut partout. Et c’est bien là le problème. Néanmoins, les animaux sont moins bêtes qu’il n’y paraît : chevaux, cerfs et taureaux seront bientôt les seuls philosophes de notre nouveau siècle. Et ce sera peut-être le seul miracle descendu du ciel qui ignore les dieux.
jean-paul gavard-perret
Andoche Praudel, Absalon – Treize histoire de bêtes, Editions Manucius, Paris, 2016, 126 p. — 13,00 €.