Claire-Marie Gosselin, Bleu d’i@i (performance)

Bleus à l’âme et au corps

Claire-Maris Gos­se­lin scé­na­rise la dou­leur subie par les femmes. Elle éprouve le besoin de faire exis­ter ce monde caché dans toute sa réa­lité par une méta­phore gran­diose. Le tex­tile et le corps « jouent » de leur effet de « peau » en confé­rant une sta­bi­lité et insta­bi­lité. Le sujet devient objet avant de se reprendre et retrou­ver l’essence de sa sub­stance sor­tie enfin de la prise et de la mor­sure malignes. Existe enfin une élé­va­tion pro­gres­sive. Claire-Marie Gos­se­lin crée la plus dou­lou­reuse prière à tra­vers ses per­for­mances. Cette prière n’est pas un vague vide, un vague silence, un vague à l’âme , c’est la plus vio­lente des acti­vi­tés men­tales : elle com­prend la mort, c’est un arrêt de la parole devant la vue du sang. C’est la pen­sée, l’offrande de la pen­sée, sa des­truc­tion. Elle est pour l’artiste le don de la pen­sée par elle-même. Ni ber­ceuse, ni som­meil de la rai­son, elle a les yeux ouverts, c’est une porte ouverte, un “ouvre toi toi-même” contre la vio­lence subie.

En de telles per­for­mances où diverses peaux mutent, Claire-Marie Gos­se­lin prie donc pour celles, tour­beuses sous leur man­teau de cal­caire, qui ont remonté à la source de leur bles­sure. L’artiste leur accorde l’affection qu’elle arrache à la rou­tine chré­tienne en tor­dant les vieux cris par sa misé­ri­corde scé­na­ri­sée. Au-delà la rup­ture de vivre, chaque per­for­mance crée une soli­tude dif­fé­rente. Les anges noirs et les esprits d’espoir s’y confrontent au milieu d’une messe en blanc et noir.
L’image se défait afin qu’un aveu échappe. S’y conjugue la chute inter­mi­nable, l’Ascension pro­gram­mée vers un lieu que les images ne peuvent plus cacher. Aube et cré­pus­cule, nuit et jour se conjuguent. Le corps à l’œuvre dans l’œuvre plonge encore où l’énigme est aveugle. Par le lan­gage pic­tu­ral, sur­git enfin une douche de lumière. Der­rière l’image il faut tou­jours sen­tir, com­prendre le geste. Tom­ber, se repé­rer dans le ravin de l’existence. L’air y dévale enfin. C’est un fouillis de noir ou un presque désert blanc. L’illisible sou­lève la dis­tance. Voyons sous le blanc du tex­tile les bleus de l’âme et du corps.

jean-paul gavard-perret

Claire Marie Gos­se­lin, Bleu d’i@i , Per­for­mance, 15 mars 2015 à 13h13, Palais des Arts Har­ri­cana, Vieux-Palais, 101, 3e Ave­nue Est, Amos, Québec.

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