Tessons épars pour le grand chambardement
Avec ce 17ème numéro des Cahiers de Tinbad, alors que la « politique » a fait son apparition dans le sous-titre de la revue, et que le point après « littérature » a été enlevé, voici un nouvel éditorial (rédigé par Alain Marc) : « nous sommes la nouvelle avant-garde. Le monde chute, le désœuvrement est grand et durable, la fin est proche. Alors re-balayons tout sur notre passage : retravaillons les mots, le corps, le sexe, le monde et l’être. »
C’est pourquoi la revue envisage et dévisage la littérature, le cinéma, les arts, la politique et la société. Et, de plus, elle revisite la fiction, l’essai, le récit, le chant, la poésie « et même la transe », ajoute le rédacteur. L’objectif est de désarticuler, réarticuler, malaxer, rassembler mots, images, idées. C’est là réaffirmer les valeurs de la complexité face au grand nivellement par le bas. Ici, le futur de demain par le réassemblage de l’hier.
Dans cet immense barouf, la revue republie un entretien entre Jean-Luc Godard et l’écrivain Elias Sanbar qui eut lieu au Volcan à l’époque de la sortie du dernier film du cinéaste franco-suisse. De plusPierre Guglielmina défend l’œuvre de Thomas A. Ravier et analyse les lettres de Neal Cassady. Claude Minière retraduit le Voyage au Moyen-Orient, d’Herman Melville et, surtout, Guillaume Basquin présente un extrait de son futur livre-hommage à Jean-Jacques Schuhl et à la liberté d’expression Tweet n°1.
Celui-ci ayant relu, deux fois, le premier chapitre de son futur Tweet n°1 et devant la nouveauté inouïe de sa prose, a vécu la même illumination que Raymond Roussel. Certes; un tel livre suscite de l’incompréhension. L’auteur craint qu’aucune auréole ne l’entoure. Mais sachons apprécier ce que la littérature peut offrir. Elle crée un véritable poison : les docteurs de la littérature ne trouveront pas de vaccin ! C’est rassurant.
jean-paul gavard-perret
Les Cahiers de Tinbad, n° 17, Tinbad, Paris, novembre 2024, 127 p. — 30,00 € pour deux numéros.