Quand des peintres se muent en enquêteurs
Pour ce premier roman qui, après sa lecture en appelle quelques autres, c’est le souhait que l’on peut formuler, la romancière (pseudonyme) met en scène ces deux peintres qui n’ont pas encore acquis la célébrité que l’on connaît. Ils sont alors âgés de 22 ans pour Claude Monet et de 21 ans pour Pierre-Auguste Renoir, mais ils ont déjà la passion de la peinture chevillée au corps.
Ce 8 décembre 1862, Léonce Ducasse, propriétaire désargenté du château du Paty dans la Sarthe, retrouve, à l’École des beaux-arts de Paris, son ami Charles Gleyre. Il voudrait offrir un portrait à chacun de ses invités, lors de leur séjour pour les fêtes de Noël. Il est inquiet, se réfère à une légende et comme dans celle-ci, depuis quelques temps, il entend claquer les dents des pendus sur son tilleul. Charles lui envoie deux jeunes peintres au talent prometteur, Auguste Renoir et (Oscar) Claude Monet. Le voyage dans le train jusqu’au Mans génère quelques incidents.
L’arrivée et l’installation se déroulent sans encombre et les deux jeunes gens font connaissance de leur environnement, tant humain que matériel. Ils rencontrent les maîtres de maison, leur fils et sa future épouse, ainsi que deux couples et deux célibataires. Deux serviteurs complètent le tableau.
L’ambiance reste froide jusqu’au moment où arrive le garde champêtre. Celui-ci annonce qu’un individu dangereux, surnommé Le Sanglier, est en fuite, recherché par les forces de l’ordre.
Une tempête de neige survient qui bloque tout le monde dans le domaine. Dans la nuit, les deux peintres sont réveillés par des bruits mais se rendorment. C’est au matin que le garde champêtre est découvert blessé à la tête et que Léonce Ducasse est retrouvé pendu à son fameux tilleul.
Auguste Renoir commence à poser quelques questions et très vite comprend qu’ils sont deux étrangers quand tout le groupe porte un regard quelque peu accusateur sur eux. Il leur faut réagir…
Léonie Vilbert installe son intrigue en commençant par une présentation détaillée des protagonistes. Et cette introduction est riche en informations sur les personnalités, sur les rapports qu’ils peuvent entretenir avec des tiers ou au sein de leur couple. Elle place ainsi un colonel et son épouse dont le handicap peut être soumis à interrogation. Un couple plus jeune a fait fortune dans le commerce avec les Antilles. Un notaire et une cousine du châtelain que celui-ci voudrait marier. Un garçon aux mœurs peu admises à l’époque et une jeune fille qui vient d’hériter d’une belle fortune. Deux domestiques, recrutés pour l’occasion, mais qu’on présente comme permanents. Et les propriétaires, un couple désargenté qui cherche les moyens de se sortir de leur situation.
Puis le récit monte en tension avec ce danger qui rôde, cette mort qui survient dans un huis clos généré par une tempête. Le criminel est dans les lieux.
Les deux peintres travaillent à leurs portraits mais aussi à mener des investigations. Ils doivent faire preuve de beaucoup de tact pour amener des confidences. L’auteure offre une vision très agréable de ces deux futurs génies de la peinture en les présentant dans leur jeunesse. C’est une découverte fort intéressante.
Avec une écriture limpide, un style enlevé, Léonie Vilbert signe un roman passionnant, un de ces cosy mysteries qui sort du lot. A découvrir !
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serge perraud
Léonie Vilbert, Les enquêtes de Renoir et Monet — Nature morte, J’Ai Lu, coll. “Policier”, octobre 2024, 224 p. — 14,90 €.