Olivia-Jane Cohen, L’immédiat

Le métier de vivre

Suite à Yose­mite (Séguier, 2006) où l’amour trans­forme en deux amants d’un nou­veau genre, ce roman de l’extrême, solaire et tra­gique — L’Immédiat — est celui d’une femme en quête de liberté et d’amour. L’urgence de vivre ques­tionne l’existence intime et le monde. La sen­sua­lité résonne à l’intérieur de l’écriture de ces pages où brûla d’abord un amour allant jusqu’à fran­chir ses limites non sans dan­ger suite à ce qui offrit un ver­tige de la beauté, la force et la souf­france, voire une forme de per­ver­sité et de cruauté qui ne laissent pas indemnes, sur­tout pour la femme de ce livre. Elle est d’exception par sa beauté, son intel­li­gence et sa sen­si­bi­lité mais se retrouve jetée dans une irré­vo­cable soli­tude. Elle se met à vivre constam­ment entre deux réa­li­tés, et à ten­ter d’optimiser un quo­ti­dien où elle ne cesse de rem­plir ce qui était arrivé comme absolu.

La don­née pas­sée devient une base exis­ten­tielle dans une réa­lité à pas­ser au crible. Ce qui s’est réduit à un ensemble de don­nées sen­ti­men­tales peut aug­men­ter ce qui fut détruit et par­fois dis­si­mulé. L’avenir ne cesse de se révé­ler incer­tain, voire cata­clys­mique. Mais une indi­vi­dua­lité — qui à force de prô­ner l’autonomie et l’absence de contraintes souffre aujourd’hui d’une insu­la­rité inédite — espère réécrire ( enten­dons revivre ) le pré­sent du monde voire de deve­nir l’héroïne d’une exis­tence dont elle serait non actrice mais réa­li­sa­trice et pro­duc­trice, où elle pour­rait s’imposer dans tous les pans de son existence.

Le tout sans s’enfermer tou­jours plus sur elle-même après des « coups » phy­siques et psy­chiques sou­li­gnés. Le passé comme l’aujourd’hui sont haus­sés par la per­son­na­lité et le style d’une telle femme ten­tant de conju­rer un pré­sent plus instable que jamais en ins­tau­rant des bar­rages sal­va­teurs. Moins nar­cis­sique qu’altruiste, la créa­trice des­sine un por­trait psy­cha­na­ly­tique et phi­lo­so­phique de qui elle est.
Le roman, ses dépla­ce­ments, ses urgences abou­tissent à décou­vrit conjoin­te­ment un espace phy­sique et une femme dotée de plu­sieurs têtes et pour­vue de plu­sieurs iden­ti­tés. Dont pas for­cé­ment la sienne vu celles qui résistent en elle. Elle  doit s’en libérer.

jean-paul gavard-perret

Olivia-Jane  Cohen, L’immédiat, Edi­tions Douro, col­lec­tion Réson­nances, 2024, 132 p. — 19,00 €.

1 Comment

Filed under Chapeau bas, Romans

One Response to Olivia-Jane Cohen, L’immédiat

  1. Villeneuve

    ” L’Immédiat ” d’Olivia est un constat de moult nanas . Cha­peau bas . Fal­lait l’écrire ! JPGP l’analyse au plus que parfait .

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