Le mariage de la carpe et du lapin
Elizabeth Prouvost en artiste douce mais intraitable (lorsqu’il s’agit de photographier le corps) trouve dans Claude-Louis Combet le plus impérieux compère propre à offrit son écot et son écho au travail entamé par l’artiste à travers le texte de Bataille. Celui du premier est en « repons » au second mais permet aussi de rebondir sur la chair saturée de solitude telle que la plasticienne la scénarise dans des prises sidérantes voire suffocantes.
Edwarda devient comme Louis-Combet l’écrit «la bête qui s’offre », libre de porter son corps entre mort et résurrection. Les images de la créatrice et le texte de l’auteur illustrent un supremum, un vertige de la perte de soi que le CD de « ex-Pi » (« Divine Obscène ») pousse un peu plus loin par son radicalisme electro-minimaliste quasi bruitiste. L’ensemble fait de ce coffret un ensemble magique et dont le prix de vente est dérisoire eu égard à la qualité du travail d’édition.
Là où Bataille cherchait la déchirure, Prouvost et Louis-Combet inventent moins une reprise qu’une suture sous le sceau de l’emprise sans partage de l’inconnu et des abysses du corps. Celui-i n’appartient plus à personne puisque aborder ses pleins pouvoirs ne contrevient plus à son extinction sous X (à savoir Eros et Thanatos). Par ses cadrages, la photographe renverse le processus d’identification. Edwarda devient celle qui préfère voir plutôt qu’être regardée. Tout cela reste pourtant un pur aléatoire puisqu’il n’est pas jusqu’à la vulve à refroidir en dépit du désir sur des terrasses ou des litières surchauffées.
Certes, et en souvenir de l’Edwarda de Bataille — qui intimait l’ordre au voyeur de regarder son sexe puisqu’il s’agissait de Dieu -, il convient encore de partager les propensions de ceux qui rejettent l’inépuisable. C’est du moins ce que nous apprend Louis-Combet. Il se glisse dans la parole de la prêtresse qui accepte de se laver dans sa “merde” au nom de sa beauté en psalmodiant : “J’attends encore ce qui me roulera / Dans un néant plus chaud que mon savoir”.
Cela s’appelle sagesse plus que vertu. Elle entraîne à cultiver la pitié pour les choses, mais pas pour les autres et encore moins pour soi-même. Certains en ce sens boivent la bière de l’amour au goulot du vagin, d’autres laissent le vin le plus délicieux dans ce verre. Mais cela ne change rien à l’affaire.
Reste alors à l’auteur de tenter par fragments de faire tomber à pic chacune de ses phrases dans les images de la photographe. C’est une « ciné-cure » ou une raison qui dépasse jusqu’à la volonté d’écrire sur la table où tout auteur — lorsqu’il est digne de sa qualité — bat les cartes. Certes, il ne s’agit pas de renoncer à des plaisirs plus sensuels mais de chercher des poux. Soyons clairs toutefois : non sur la tête d’un chauve mais dans la moustache du bas de Mme Edwarda. Pour ce faire, le poète traverse la scène sur un pont lourd de cadenas d’amour tandis que l’égérie de la photographe rejoint un porc épique qu’elle tire à bout de bras pour que la messe soit dite : jeu, set et match. Fiasco et défaillance aussi. Un tel ensemble est admirable.
jean-paul gavard-perret
Elizabeth Prouvost & Claude Louis-Combet, Les guenilles, Edwarda, éditions crbl, Valence, 2016, 25,00 €.
Coffret accompagné du CD de « Ex-Pi » (« Divine Obscène).
Le Littéraire, bonjour,
Pourriez-vous repréciser les coordonnées de l’éditeur, celui que vous avez donné est introuvable :
Elizabeth Prouvost & Claude Louis-Combet, Les guenilles, Edwarda, éditions crbl, Valence, 2016
CRBL Valence ????
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JD
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