Remy Disdero, Oaristys et autres textes

Remy Disdero, Oaristys et autres textes

Sombres incandescences

Poète des Danubes insondables, débondeur des tonneaux de Danaïdes, flâneur des deux rives de l’Achéron, Rémy Disdero – les jours « sans » – se satisfait voire se congratule de son « insatisfaction plantée à demeure » et dit-il « l’avare en moi bondit comme un gymnaste ». Mais, très vite, au lieu de se disloquer, il se reprend dans un monde en loques où des bras tombent du ciel et où « des grappes de peaux de boudins » pendent au coin des rues et qu’importe qu’ils soient noirs ou blancs.
D’autant que la poésie en prose ou vers devient multicolore et atroce là où les brutes sont légion dans des tableaux à la manière des Flamands.

Il est vrai que Disdero est l’« enfant-bouc » d’un plat pays où son livre est édité et où les fantasmagories sont de mise en littérature et peinture. Et l’auteur fait partie haute des irréguliers de cette terre. A fleur de ciel et de nerf, sa poésie rameute un inconnu pour rêver plus haut que la vie et aimer au cœur de la haine. Tout est incandescent et indécent dans un carnaval des fantômes ensanglantés. L’auteur a le cœur à l’outrage. C’est une question de tempérament. Au besoin et au passage, il tient la lumière par le ventre et écrase quelques serpents (dont son sexe).
Dans Oaristys ce n’est plus le démon de midi qui vient risquer sa peau mais celui des minuits polaires où les loups somnambules se frottent aux orgues des constellations glacées la bouche pleine de silex. Entre classicisme et baroque, le monde se joue à la roulette mentale mais il déjà changé de place. Les textes deviennent des scènes de l’espace tendu entre rêves et cauchemars – avec une prédilection certaine pour ces derniers.

Disdero continue à écrire la clé sur la porte, prêt à disparaître sans attendre le jour de trop mais tout autant à revenir en égaré pour nous jeter aux confins du monde et dans les tunnels d’insomnie où chacun découvre que la terre promise est un fleuve merdeux. Nous la chevauchons, nous le parcourons de la naissance à la sénescence mais l’auteur nous le rappelle en soignant le mal par le mal pour éviter que nous nous pendions. Qu’il en soit remercié.

jean-paul gavard-perret

Remy Disdero, Oaristys et autres textes, Cormor en Nuptial éditions, 2018,  128 p. – 16,00 €.

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