Philippe Forest, Shakespeare

Philippe Forest, Shakespeare

Dans cette nouvelle collection, Philippe Forest sait faire briller la lumière d’abîme et de gloire de Shakespeare. Entre biographie supposée et exercice de style, son récit iconographique mais humain secoue le buste du dramaturge par fougue doublée parfois d’un désarroi étrange d’autant plus que ses personnages et acteurs interprètent et parlent ce qu’ils ont appris par cœur et qu’un autre a mis dans leur bouche puisque l’auteur d’Hamlet ne savait pas précisément où il allait.

Certes, il donna parfois un tour faussement ordinaire à ceux qui, en prose, emploient les mots de la vie de tous les jours tout en abusant au besoin de tous les procédés que sa poésie et sa rhétorique recensent. Entre réalité et vraisemblance, il s’est écarté des idées que nous nous en faisons. Mais il raconte ce qui aurait pu être. Après tout, Forest le fait le comme un moraliste parfois érotique. Chez lui, le corps devient lui-même langage et il est montré en instance de pouvoir s’imposer à un alter ego sous la contrainte de la pression de la foule et des enjeux chargés de mythe.

Forest ramène à l’origine même de Shakespeare qui s’intéressa moins aux à-côtés du combat des hommes qu’à leur psyché. L’auteur montre comment le passage à l’être s’effectue dans ce qui, pour beaucoup, reste un phénomène de foire. Et il souligne que son théâtre permet de sortir la chair au moment où se déploie une fougue, une volupté qui ne peuvent qu’interroger et mettre à mal les certitudes autant des femmes que des mâles.

Les deux reçoivent de telles pièces moins comme un uppercut au foie qu’un cérémonial et un acte de foi en un direct au cœur sous la lumière des spotlights ou du moins des bougies lorsque son théâtre s’illumina. Mais il étincelle encore là où se mêlent le mirage des mots et le vertige des identités.

jean-paul gavard-perret

Philippe Forest, Shakespeare, Flammarion, coll. D’Après, 2025, 200 p. – 19,00 €.

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