Liant comique et gravité dans ses licences poétiques, Typhaine Garnier met le point ultime à tout ce qui doit rester d’essentiel lorsqu’il s’agit de faire le vide. Le tout en cinq packages : “fragile, Tout-venant, Ne pas ouvrir 1 et 2 et Fins de série” avant de s’achever par un Index de listes symboles d’une hybridation délicieusement confondante là où des sourires ratés s’alignent derrière tubes et boîtes parfaitement alignés.
Tout est construit sous forme de sortes de petites annonces de jadis afin de présenter les choses à céder de manière insolite — que ce soit une “prothèse à ouï-dire” ou une “fin de vie en famille” - suivies de l’indication du lieu géographique où est censé se situer l’élément proposé, que ce soit Mouillepied, Belle Vie en Auge ou Néant-sur-Yvel.
L’ensemble est grevé de détails aussi épineux (au besoin) que drôles au sein de listes, poèmes, chansons, comptines avec une foule de décalages pour estourbir le passereau qu’est tout lecteur.
Néologismes et références — de Hergé à l’auteure de L’Amant — créent un burlesque qui transforme le biographique en farce et (auto)dérision. Ce qui n’empêcha à l’émotion de poindre quand l’occasion se fait sentir. Mais toujours dans un exercice de pudeur afin d’éviter le pathos.
Cette filature d’implosion dans nos crépuscules devient l’Aleph de tous les âges. Cela résonne aussi un peu comme une suite de pétitions de principes dégingandés qui luttent contre des déifications douteuses et bien des opiums des peuples et des opprimés. Avant qu’un silence abyssal et un blanc plus lustral que ceux d’un Beckett n’arrivent.
Avant cela, le déversoir ne cesse de fonctionner. Non sans séduction et emprise poétique où tous les robinets sont ouverts tant par les mots que leurs tournures espiègles, effrontées voire bien plus.
jean-paul gavard-perret
Typhaine Garnier, ide-Grenier”, dessins d’Onuma Nemon, éditions Lurlure, 2023, 96 p. — 17,00 €.