Scènes de chasse en bréviaires
L’homme au revolver soudain voulut parler — car il était surtout derrière le canon, donc du bon côté, et qu’il pointait les signes noirs dans le blanc de la page. C’était comme des papillons qui volaient et Meier se fit une nouvelles fois tireur d’élytres avec, en helix sire sans coquille, des mots qui rampent et brûlent. Le tout afin qu’après leur morsure ne reste qu’un “grand plié” où si l’image peut plier, elle n’est en rien victime. Elle sait que la parole ne pourra y entrer, mais en sa grande mansuétude (ou ses instants de faiblesse) elle lui accorde son vert seau pour y laisser ses traces.
Après la chasse, vient le festin. Appelons cela se mettre à table sur la nappe blanche de chaque page. Meier rappelle néanmoins que c. hante é.. Saliver oblige ainsi à bâillonner le “quaqua” (Beckett). La langue est donc là pour les saveurs quoique possiblement elle soit à peler pour devenir assistante du poète en danger. Il attend de faire son nid dans ce blanc de table comme il y a un blanc de poulet.
Et c’est ainsi que le créateur, de césures en “sabir sampling” de César de Bas en Haut, scripteur à ses heures et caviardeur en d’autres, voudrait faire toute une histoire mais sans tomber dans l’anecdote. Et il s’étonne après que cela soit si difficile. Soyons cependant généreux envers lui “On n’est pas sérieux passé soixante-dix ans”, aurait à bon escient rappelé Rimbaud s’il avait vécu si longtemps.
A partir de d’un tel caviar d’âge, ce n’est pas seulement parce que le temps court mais parce que les instants s’évaporent que le “prends garde à toi” du Cow-Boy lorrain n’est plus que le las saut ou un lit coucouroucoucou qui, a défaut d’attraper la langue (qui n’est qu’un appât rance), cherche des B.B. (du moins la sienne) dans les langes des images.
Meier dit faire avec et s’en sort plutôt mieux que bien. Il avance où l’ironie trame le sérieux pour que sa maison de l’être tout en labyrinthe et escalier trouve autour de la table de festin de solides murs-murs en béton Mallarmé. Quoi de mieux pour cherche à quoi rime le poème ? Même si — et pour qu’au nom de l’amour perle l’âme du poète — il croit trouver son “bon qu’à ça” dans le bac à légumes ou sable des images.
En dieu Pan ! (sur bec), il sait toutefois que pour réveiller la muse rien ne sert de lui montrer des images. La seule règle tient en un mot : “Parlez”. Et c’est pourquoi une fois de plus et pour le sauver, la parole s’encastre sur le papier. Car quoiqu’il en dise, faire marcher le texte permet d’avant C. Il le prouve avant sans doute et comme Beckett d’écrire un jour “finalement assez”.
jean-paul gavard-perret
Richard Meier,
- Fusil est image,
- La lettre s’encastre sur le papier dans la maison,
Editions Voix, Elme, 2023, deux Leporello, prix non indiqué. Commande chez l’éditeur.