Richard Meier, Fusil est image & La lettre s’encastre sur le papier dans la maison

Scènes de chasse en bréviaires

L’homme au revol­ver sou­dain vou­lut par­ler — car il était sur­tout der­rière le canon, donc du bon côté, et qu’il poin­tait les signes noirs dans le blanc de la page. C’était comme des papillons qui volaient et Meier se fit une nou­velles fois tireur d’élytres avec, en helix sire sans coquille, des mots qui rampent et brûlent. Le tout afin qu’après leur mor­sure ne reste qu’un “grand plié” où si l’image peut plier, elle n’est en rien vic­time. Elle sait que la parole ne pourra y entrer, mais en sa grande man­sué­tude (ou ses ins­tants de fai­blesse) elle lui accorde son vert seau pour y lais­ser ses traces.

Après la chasse, vient le fes­tin. Appe­lons cela se mettre à table sur la nappe blanche de chaque page. Meier rap­pelle néan­moins que c. hante é.. Sali­ver oblige ainsi à bâillon­ner le “qua­qua” (Beckett). La langue est donc là pour les saveurs quoique pos­si­ble­ment elle soit à peler pour deve­nir assis­tante du poète en dan­ger. Il attend de faire son nid dans ce blanc de table comme il y a un blanc de pou­let.
Et c’est ainsi que le créa­teur, de césures en “sabir sam­pling” de César de Bas en Haut, scrip­teur à ses heures et caviar­deur en d’autres, vou­drait faire toute une his­toire mais sans tom­ber dans l’anecdote. Et il s’étonne après que cela soit si dif­fi­cile. Soyons cepen­dant géné­reux envers lui  “On n’est pas sérieux passé soixante-dix ans”, aurait à bon escient rap­pelé Rim­baud s’il avait vécu si longtemps.

A par­tir de  d’un tel caviar d’âge, ce n’est pas seule­ment parce que le temps court mais parce que les ins­tants s’évaporent que le “prends garde à toi” du Cow-Boy lor­rain n’est plus que le las saut ou un lit cou­cou­rou­cou­cou qui, a défaut d’attraper la langue (qui n’est qu’un appât rance), cherche des B.B. (du moins la sienne) dans les langes des images.
Meier dit faire avec et s’en sort plu­tôt mieux que bien. Il avance où l’ironie trame le sérieux pour que sa mai­son de l’être tout en laby­rinthe et esca­lier trouve autour de la table de fes­tin de solides murs-murs en béton Mal­larmé. Quoi de mieux pour cherche à quoi rime le poème ? Même si — et pour qu’au nom de l’amour perle l’âme du poète — il croit trou­ver son “bon qu’à ça” dans le bac à légumes ou sable des images.

En dieu Pan ! (sur bec), il sait tou­te­fois que pour réveiller la muse rien ne sert de lui mon­trer des images. La seule règle tient en un mot : “Par­lez”. Et c’est pour­quoi une fois de plus et pour le sau­ver, la parole s’encastre sur le papier. Car quoiqu’il en dise, faire mar­cher le texte per­met d’avant C. Il le prouve avant sans doute et comme Beckett d’écrire un jour “fina­le­ment assez”.

jean-paul gavard-perret

Richard Meier,
- Fusil est image,
- La lettre s’encastre sur le papier dans la mai­son,

Edi­tions Voix, Elme, 2023, deux Lepo­rello, prix non indi­qué. Com­mande chez l’éditeur.

 

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