Nul autre matin, nul autre départ que celui de l’existence même quand il se fait tard mais qu’à l’aurore s’effacent — du moins pour un temps — certains cauchemars.
Reste aussi l’échange avec ce qu’on croyait avoir oublié mais qui revient sans tricher avec les mots — car ce serait trahir le langage.
Retrouvant des anecdotes, le poète en fait sa mythologie personnelle. Dialecticien du vide et du plein, de l’ailleurs et de l’ici, des eucalyptus et de la mésange, il investit certaines failles, sensible à tout mais sans feindre d’être le maître du temps : il sait que ce dernier le possède.
Mais l’enjeu de la poésie est là : tenir à cet allant de vie qui culmine dans le regard de mémoire. Il en devient l’absolu et le dépassement. Et ce, à la saisie encore vive du monde.
Bref il s’agit d’accueillir ce qui reste et semble venir d’une porte entrouverte “pour l’éloge infini des choses insignifiantes”. Elles enchantent encore qui sait, comme Farina, apprendre les expériences que la vie octroie sans forcément des ménagements mais aussi parfois des gerbes de lumière.
jean-paul gavard-perret
Raymond Farina, Un printemps sans fenêtre suivi de Réminiscences, N&B Editions, Colomiers, 108 p. — 13,00 €.
” Un homme , a écrit Carlyle , doit employer la première partie de sa vie à parler avec les morts , la seconde à converser avec les vivants , la troisième à s’entretenir avec lui-même ” . Ce fut mon sujet de dissertation du Concours Général . J’avais 15 ans . Aujourd’hui l’hiver de ma vie rejoint la poésie du livre de Raymond Farina qui éclaire ce texte bien mieux que les pauvres mots d’une adolescente studieuse mais inculte .