C’est un livre absolument passionnant dont on ne peut que recommander la lecture.
David Fiasson expose, d’une manière claire, rigoureuse et lumineuse, l’histoire, les enjeux et la portée de la bataille de Crécy qui, en 1346, vit l’armée de Philippe VI de Valois écrasée par celle de son cousin et rival Édouard III d’Angleterre.
Une étude rigoureuse car l’auteur passe au crible l’ensemble des sources et des travaux historiques, avec un esprit critique qui lui permet de modifier les perspectives. Bien des idées reçues sont ainsi contestées, comme celle affirmant que les Français ne surent pas tirer les conséquences tactiques de leur défaite. Ou cette analyse très juste sur les réalités de la guerre médiévale, faite par des hommes imprégnés d’idéaux chevaleresques, mais qui voient le roi d’Angleterre ordonner le massacre des prisonniers.
Réalité qui remet en perspective toute l’analyse clausewitzienne sur la brutalisation de la guerre à partir de la Révolution, ou de la guerre de 14–18. L’armée française ici décrite ne correspond pas à l’image d’Épinal : “L’opposition caricaturale entre une armée anglaise moderne et une armée française confite en chevalerie ne correspond pourtant en rien à la réalité”, écrit David Fiasson.
Un ouvrage passionnant car on se trouve plongé d’une part dans l’univers guerrier du Moyen Age, depuis la piétaille jusqu’aux chevaliers, aussi bien au niveau de l’usage des armes que de la mentalité des grands seigneurs de l’ost royal ; et d’autre part dans l’histoire de cette expédition voulue par le Plantagenêt, débarquant en Normandie et remontant jusqu’au nord de la France, afin d’y obtenir une bataille décisive.
Une chevauchée très bien préparée, lors de laquelle les Anglais firent preuve d’innovation et d’initiative. La défaite fut le fruit d’erreurs graves de la part des Français qui ne surent pas protéger leurs arbalétriers de la puissance des archers anglais appuyés par des hommes d’armes démontés. Les vétérans des guerres écossaises jouèrent à ce titre un rôle majeur.
Jean II crut éviter l’erreur de son père fuyant très vite le champ de bataille où son armée se faisait tailler en pièces. Il resta donc sur place à Poitiers et fut fait prisonnier. Mauvais enseignement de Crécy. Seule la prudence de Charles V permit au royaume des Lys de redresser la tête.
Oui, un livre vraiment passionnant !
frederic le moal
David Fiasson, Crécy 1346. la bataille des cinq rois, Perrin, novembre 2022, 320 p. — 25,00 €.