Tout ce qu’il est possible d’imaginer
En poésie, le Haiku reste la forme idéale pour dire n’importe quoi. Doté d’une puissance métrique pour évoquer la nature selon une tradition japonaise et en une sorte de double invasion, l’occident aime à y chinoiser.
Jacques Merceron ne s’en prive pas et tire toutes les substances énigmatiques qu’on peut accorder à un tel registre.
Et c’est plutôt réussi. Car, contrairement aux poètes — qui dans leurs ouvrages ont tendance à accorder aux mouches les derniers hommages ou dévergondages — Merceron les fait sourire même là où généralement — près du pont de Gard ou ailleurs et si on en croit le poète — seul le chat le fait.
Et pas seulement celui du Cheshire cher à Lewis Carroll.
Quant à Cauda, il n’a pas besoin qu’une mouche le pique pour sauter sur une telle occase. Il se fait oukase des mots en présentant ici son bestiaire idéal.
La grenouille se marre en hommage aux mouches écrasées sous un ciel de couleur de sperme et “Relevées par un mouchoir” tout autant nacré que lui.
Si bien que, par ces haikus de gala enluminés par Cauda, tout un monde se déconfine de l’enclos du sens. Il est remplacé par le compotier de bien des songes par des garnements d’un âge plus ou moins avancé.
Ils gardent un goût marqué pour la facétie comme pour le merveilleux là où les yeux mouchetés des mouches, tels deux lumignons, attirent tout ce qu’il est possible d’imaginer.
jean-paul gavard-perret
Jacques Merceron & Jacques Cauda, Par le rire de la mouche, Editions Pourquoi viens-tu si tard ?, janvier 2022, 78 p. — 10,00 €.