Jacques Cauda, Le jet de l’oeil au beurre rouge

L’oeuvre au blanc

L’œil pos­sède ses propres érec­tions. Elles se pra­tiquent sous forme de coups dès que le cres­son sen­ti­men­tal oblige à bais­ser les pau­pières selon une phé­no­mé­na­lité cau­dale. Plus le coup d’œil est péné­trant, plus la liqueur se dis­tille au plus vite.
C’est là, pour l’auteur d’un livre au blanc et aussi au banc de la morale, expri­mer un “Je peins, j’existe ou je feins j’existe”.

Mais la dua­lité reste ouverte. Puisqu’ici„ dans la seule dési­gna­tion des apos­tilles s’unissent deux actions simul­ta­nées : tou­cher et cou­cher en des induc­tions “dont la règle, regola del colo­rare, est de se pré­sen­ter au regard dans l’exercice même de l’aïsthèsis : le feu aux joues”.
Bour­reau de lui-même comme du réel, l’auteur sou­vent hacheur de viande pro­pose des ins­tants d’érubescence où celle qui pose est car­mi­née en sa nudité et ce, en mémoire à ce que disait ce canari jaune nommé Pous­sin et qui affir­mait que le sang court sur la peau d’ivoire.

Le pourpre fait du corps un écor­ché dont l’Apollon — peintre indé­cent — pousse la chair et l’intelligence jusqu’au cinabre. La voix de la chair s’entend par colo­ris en acte. Si bien que la région la plus intime de la femme devient le palais des spores où se concoctent des joies cen­trales au risque d’ailleurs d’écorcher son sujet. Il inonde le texte de toute sa jouis­sance.
Preuve que le fomen­teur s’interdit toute limite et que tout devient visible là où l’effet de sur­face crée la profondeur.

Il n’est pas alors jusqu’à avec l’humeur aqueuse de l’œil de s’injecter de sang sous l’influence de la cou­leur par une extrême labi­lité là où l’incarnat est non écarté mais incarné. Signe que la peau n’a rien de gant, d’un tégu­ment mais relève d’un onguent dont de Koo­ning lui-même se ser­vit pour mon­trer, de l’intérieur, la fémi­nine jouissance.

jean-paul gavard-perret

Jacques Cauda, Le jet de l’oeil au beurre rouge, Danièle Ber­thet, coll. Apos­tilles, 2021. En vente via le site de l’artiste.

2 Comments

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2 Responses to Jacques Cauda, Le jet de l’oeil au beurre rouge

  1. Villeneuve

    Jacques , Jean-Paul et Danièle apos­tillent dans un dépas­se­ment de Mar­gue­rite Your­ce­nar dont ” l’œuvre au noir ” vaut bien l’œil au beurre rouge .

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