Le testament de la fille morte, oeuvre disparate quant à sa forme (de fragments en visions) fut publié chez Gallimard par Paulhan en 1954. Et ce, même si l’édition était prévue en 1947 — mais l’auteure oublia de renvoyer le bon à tirer. A partir de cette période, la femme d’Henri Thomas et l’Amie d’Antonin Artaud renonça à la littérature pendant plus de cinquante ans.
De tels textes sont une réponse aux injonctions de Rimbaud et d’Artaud. A propos de ce dernier : “c’est le plus grand être de théâtre que la terre qui ne s’en fout pas mais en a peur ait eu, à voir sur ses propres vagues trembler de fureur, de fièvre, d’animosité.”
Ce livre est une expérience autant individuelle que générique. Elle offre au lecteur du regard et de la vision. C’est là que réside le « secret » de l’oeuvre de Colette Thomas.
Ses mots regardent ceux qui les lisent s’ils ne cherchent pas la communication d’un secret mais la communion dans le secret de l’incommunicable.
C’est pourquoi, si extériorisation du secret il y a, demeure tout autant la préservation de son caractère intime. En ce sens, il reste fidèle à ce que Valéry écrivait dans Littérature : « le meilleur ouvrage est celui qui garde son secret le plus longtemps ». L’autrice de ce livre unique livre est à sa façon une Sainte par l’amour incommensurable qu’elle porte à Artaud, lequel malgré le sentiment qu’il partagea ne put lui répondre de voir se liguer contre lui la cohorte des dieux et des démons.
Chez les deux, les exigences étaient aussi paroxysmiques que leur besoin d d’absolu. Elle ne put connaître que l’isolement dans la cellule de l’amour. Elle dut y accomplir sa pénitence comme s’il fallait payer pour la puissance de l’être à laquelle cette passion fut portée. Elle se retrouva peu à peu — faute de “mieux” — tendue en un appel vers la solitude.
Personne ne s’est autant qu’elle assumé en l’absolu de l’amour jusqu’à la mort. C’est son amour même qui l’a tuée — comme il tua en partie l’amant qui ne put la suivre où elle voulut l’emporter.
jean-paul gavard-perret
Colette Thomas, Le testament de la fille morte, postface de Pacôme Thiellement, éditions Prairial, Paris, 2021.
Bonjour,
Votre lecture est juste et belle.
Je me permets de vous informer que je présente au théâtre de l’Atlante place Dullin à Paris entre le 15 et le 23 décembre “Le débat du coeur entre Colette et Antonin.
Bien à vous