Et la saga visionnaire continue…
Cette série, commencée en 1992, poursuit sa trajectoire nourrie d’événements qui se sont déroulés récemment aux USA.
Luc Brunschwig adapte, à son fil conducteur, les soubresauts de la société américaine dans une intrigue façonnée avec son indéniable talent.
Joshua est sorti de sa cellule pour son transfert au tribunal. Les marcheurs profitent du fleuve pour se baigner alors que Lucy Bulmer filme le sergent Domenigo qui s’ébat dans la plus complète nudité. Colin fait partie du transfert car il est les yeux et les oreilles du gardien-chef. Le sergent est face à un problème. Le pont permettant de franchir le fleuve pour poursuivre leur route est barré par la shérif et une cinquantaine de types armés.
Cyrus et Adam se préparent pour leur plaidoirie et proposent à Xu, l’épouse de Joshua, de l’emmener au tribunal. Sur le chemin, un énorme camion les percute. Pendant ce temps, Xu ouvre à la “police” et est enlevée.
C’est aussi le cas pour Joshua qui est délivré de son fourgon cellulaire par des Logan’s qui, sous la menace de tuer son épouse, l’obligent à prononcer un discours dénonçant les actions de Jessica. L’enregistrement terminé, les Logan’s veulent faire le ménage, tirent sur Xu - ce qui déchaîne la fureur de Joshua. Celui-ci retrouve ses réflexes de combattant d’élite et tue tout le monde. Colin et lui sont libres, mais…
À travers les personnages emblématiques que sont Jessica Ruppert et Joshua Logan, Luc Brunschwig et Laurent Hirn posent la question de savoir si les États-Unis, et le monde, sont capables de sortir de la logique de l’économie de marché et de la mondialisation, pour créer une société plus juste.
Le récit a commencé en 1997 par l’accession, à la mairie de New York, de Jessica Ruppert une grande humaniste. Quelques années plus tard, compte tenu des résultats, elle est devenue la secrétaire aux affaires sociales du nouveau gouvernement, et de surcroît son premier membre !
Joshua, un soldat d’élite, est victime d’une machination. On l’accuse de l’assassinat de centaines de personnes.
Jessica s’apprête à mettre en place deux cents mesures. Ses ennemis se déchaînent et emploient tous les moyens possibles pour torpiller ses avancées sociales. Des milices, les Logan’s, un mouvement radical d’extrême droite qui se revendique de Joshua, sont prêt à tout pour arriver à leurs fins. Toutes les traîtrises, les abjections sont bonnes pour ne pas remettre en cause le capitalisme, la mondialisation.
On retrouve des idées, des concepts utilisés il y a peu par un ex-président à la chevelure d’une couleur pisseuse, des éléments de langage que les anti-Jessica répètent à l’envi sur l’avenir de l’Amérique, sur le rayonnement de sa civilisation, la peur de perdre une identité fort contestable, d’ailleurs.
Le tempo du récit est très rapide. Le scénario passe d’une scène à une autre, d’un protagoniste à un autre allant parfois changer trois fois dans la même planche. Laurent Hirn reste égal à lui-même en matière de graphisme avec, toutefois, un dépouillement du meilleur aloi. Il donne des vues de foule et des décors, tant urbains que ruraux, superbes de justesse, l’économie de traits, le choix des couleurs donnent aux personnages une densité précieuse, aux expressivités fort bien retranscrites.
Un album riche en péripéties, en éléments d’intrigue, qui augure d’un final dantesque du cycle III et de la série.
serge perraud
Luc Brunschwig (scénario) & Laurent Hirn (dessin et couleur), Le Pouvoir des Innocents — Cycle III : Les enfants de Jessica t.04 — Guerre civile, Futuropolis, juin 2021, 64 p. – 16,00 €.