Ce livre rassemble les textes d’Andrea Zanzotto consacrés à Venise et la Vénétie. L’auteur en était originaire il ne l’a jamais quittée. Venise et sa région sont prises à la fois vues de très près et dans un cadre plus vaste. La ville y apparaît inscrite dans l’espace et le temps.
Elle n’est pas isolée telle un joyau détaché du reste. Elle doit s’approcher de l’extérieur et se comprend à travers sa lagune et son ancrage dans la Vénétie, lieu de terribles batailles de la première guerre mondiale, et plus tard de la lutte partisane.
Mais la cité des doges est aussi celle du dialogue “entre les gens, les temps et les espaces”. C’est donc une ville disparate, saturée de signes. Zanzotto propose donc une vision originale, dégagée de ses images classique. Le poète est attentif à la syntaxe des trajets.
Et l’écriture se particularise par l’intérêt à l’infiniment petit. Cohabitent la boue et l’or, l’ouvragé et l’informe. Et il n’est pas jusqu’au carnaval à être revisité pour réanimer sa dimension politique oubliée.
Zanzotto mène là une approche de chroniqueur et de paysagiste. S’y mêlent une figure locale — Nino — et l’histoire de son village et de sa propre maison. La Vénétie devient un lieu d’une de survivance incongrue et menacée pour de nombreuses raisons dans cette dérive. Elle devient “une topographie aquatique et une planimétrie mentale” où se mêlent bien des perceptions et réverbérations oniriques là où la ville reste le paysage particulier.
L’homme et la nature interagissent et se confrontent dans un jeu de l’intime comme du politique chez un auteur rare qui collabora avec Fellini pour son Casanova profondément vénitien.
jean-paul gavard-perret
Andrea Zanzotto, Venise, peut-être, éditions Nous, Paris, 2021.