Les odalisques (livre des listes — III)

Me fai­sant des poètes et des autres le mes­sa­ger je sais que seules les femmes peuvent sau­ver le monde. C’est pour­quoi, au nom des mâles séants, je salue Les soli­taires qui noient le nar­cisse ascète, Les bre­tonnes qui se crêpent le chi­gnon, Les bigotes de Bagnères,  Celles qui  basses de pla­fond sont hautes de cuisses, Les accrou­pies voleuses, Les vété­ri­naires qui ont du chien, Celles dont la fièvre monte à El Paso,  Les ter­rines du chef, Les véné­rables de lapins, Celles qui sentent le sable chaud, Les coquettes en fonte, Les chauf­feuses et les loco­mo­tives, Celles qui vont à confesse, Les poules amen, Les suceuses de roux, Les au nom du fils, Celles qui ont des mouettes sur leur che­mi­née, Les crou­pières, Les tri­co­teuses de points mousses, Les femmes à Dior, Les femmes à Dieu , Les mou­lantes à café, Les pros du pot, Les équi­li­bristes, Les ecclé­sias­tiques, Les doyennes des comices, Celles dont le rut est un bel canto, Celles au car­dan solaire, Les renon­cu­la­cées, Celles qui en ont jamais assez, Celles  qui sur le dos  se disent que le crépi du pla­fond aurait bien besoin d’être repeint, Les dan­ge­reuses au ron­ron hoqueté, Les pilules à mère, Les trem­peuses de baguettes, Les veuves de guère, Les téné­breuses, Les incon­so­lées, Les ber­gères étoi­lées, Les revenez-y, Les por­teuses de cha­peau à voi­lette, Les aiguilleuses du ciel de lit, Les secondes mains, Les vits gou­reuses, Celles qui tapent du pied, Celles qui ont une épingle dans leur chi­gnon, Celles qui muent gay, Les Mar­tine à la page, Celles qui vont droit au but Et les tireuses d’élytre, Les tra­vailleuses au noir et les décla­rées, Les étroites écluses, Les écor­cheuses à vif, Les femmes du bou­lan­ger, Celles qui attendent le fac­teur ou le répa­ra­teur de machine à laver, Les anciennes poé­tesses, Les blanches minettes, Les dames de com­pa­gnie des wagon-lits, Les mal réveillées au désha­billé com­pli­qué, Celles qui hum­ble­ment se penchent, Celles qui montent au rideau, Les femme à lunettes, Les ber­li­noises éclai­rées, Les choutes de Bruxelles, Les Méro­vin­giennes, Les mélo­pées, Les Branle-bourgeois en concert, les mal­adroites de bonne volonté, Les com­plexées, Les entre­met­teuses qui tirent au flan, Celles qui lèvent l’ancre, Les fri­leuses, Les fausses fileuses, Celles qui le soir ont la migraine, Les skieuses hors-piste, Les vio­lo­nistes d’Ingres, Les conju­gueuses de vie à l’imparfait du sub­jonc­tif, Les bas bleus mais qui les déroulent sur leurs cuisses, Les océanes indiennes, Les immo­biles, Les pas si fixes, Celles qui n’ont de gland que celui de leur abat-jour, Les plates tour­nantes, les Jen­ni­fer Lopez, Celles qui ne pra­tiquent que le samedi soir, Les ser­vantes au grand cœur qui ne sont pas jalouses, Les petites Suisses (en boîtes de six), Les terres cuites, Les potiches, Celles qui se forcent la main, Les déco­ra­trices d’intérieur, Les ouvreuses de fer­me­ture Eclair, Les visi­teuses du soir, La Grande chan­delle du Ku-Klux-Klan, Lili La Tigresse, Celles qui sont en tresses ou détresses, Les quoi que, Les hôtesses de l’aire des auto­routes, Les peut-être, Celle qui ratent leur train, Celles qui disent ça sera mieux demain, Les patriotes et les griottes, Celles par qui sonnent le glaoui, Les épouses à temps par­tiel, Celles qui font des vagues dans Vogue, Les lécheuses de frites, Les fausses blondes, Les bâilleuses de fond, Les qui font des manières, Les for­ma­listes et les déli­cates, Celles qui embrassent les yeux ouverts, Celles dont le beau cou plaît beau­coup, Les fouilleuses ambi­dextres, Les petites mains, Ma tante et sa voi­sine, Les mas­seuses per­verses, Les Fanny Ardentes, Celles qui sautent sur l’occasion, Les Cathe­rine de “Mais dis si !”, Les dures de la feuille et les veuves du poignet.

Qu’une fois encore je les salue. Et ce, depuis ma chambre étouf­fante où les fleurs se fanent même avant de s’ouvrir.

Jean-Paul Gavard-Perret

2 Comments

Filed under Erotisme

2 Responses to Les odalisques (livre des listes — III)

  1. Valverde Pierre

    Ce texte Jean-Paul, est si joli­ment tourné, que, si tu le per­mets, je l’enverrai à un bon ami … lec­teur assidu qui appré­ciera !
    Cor­dia­le­ment
    Pierre V.

  2. jean-paul gavard-perret

    Avec plai­sir.

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