Le un, le deux voire le multiple
Patrick Dubost, en parfaite logique, commence en sa prime enfance à croire ce que pensaient les gamins qui ont aujourd’hui le même âge que lui : les bébés se font en embrassant avec la langue et toute femme n’aime qu’un homme dans sa vie. Pour autant, très vite le mouvement s’accélère. Surtout lorsque ces futures fidèles s’emparent du sexe du poète pour le secouer très vite.
Le petit théâtre intime de l’éros a vite fait de changer de cap et de “bonne” espérance - ils ne sont pas forcément ceux que la pudeur, l’hypocrisie ou l’ignorance enseignent. D’humeur en humeur, de glissement de soutif en celui d’une culotte, le terrain de jeu devient de plus en plus passionnant.
Il existe en cette propension deux axes : la floraison de l’amour et la défloration de son faire. Le vertige et le gouffre. Quelle position adopter ? Quel choix opérer?
Dubost ne répond pas mais donne des directions. Ses diverses stratégies rappellent — par la bande — ce qui nous enchante et nous désole (les histoires d’amour se finissant mal en général).
Pas de quoi pour l’auteur en faire une choucroute. Bon bougre, il donne, plutôt que des bons et mauvais points, quelques marches à suivre et autres process afin qu’un clitoris bien choyé donne à la partenaire le cri qui tue en sa petite mort. Néanmoins, il ne s’agit pas seulement d’orgasme mais aussi de sentiments entre paso-doble corps accords et valses des adieux.
Dubost souligne qu’en croyant que l’amour est simple tout se complique. Il existe donc dans son livre une belle leçon de la chose érectile.
Entre incarnation sulfureuse et idéalisation platonique, le temps de l’amour en sa mécanique libidinale lévite ou s’enfonce dans diverses zones de cohérence ou d’illusion. Rien de neuf sous le soleil en ce domaine comme les autres. Mais chaque situation reste un cas d’espèce. Le poète le rappelle dans ce qui est bien plus qu’un manuel.
Il fait le tour de la question à l’épreuve d’un temps où le numérique n’est pas la propédeutique la plus compétente. En ce sens, Dubost souffle le chaud et le froid, la braise et la cendre, l’extase et l’échec.
Il montre que qui veut faire l’ange fait la bête (et vice versa). Ce qui vient à se reposer (ou presque) la question de l’amour et de son faire : tient-elle du sacrifice, de l’ascèse ou de la simple fornication ?
Ne reste au lecteur, dans la scission du même dans la chair et l’âme, qu’à faire converger selon divers modèles le doute et le désir, le commencement et la rupture en ce qui constitue le plus aimable des jeux ou la seule raison de bien vivre, à l’ombre ou la lumière du dieu Eros.
jean-paul gavard-perret
Patrick Dubost, Aimer & faire l’amour, Éditions La Boucherie littéraire, 2020, n.p.