Héritier d’Artaud, et “les nerfs face contre terre à terre”, Paul Guillot fait remonter et vibrer de “lalangue” chère à Lacan.
Devant ce qui tue et au nom d’une rage salutaire et salut terre, l’auteur prouve que, les voix de la chair, chacun peut s’en passer à condition de savoir s’en servir pour lancer en un ciel vide ou une mer de salive de quoi transpercer le premier et explorer les gouffre de la seconde au nom d’une force tellurique qui fait bouger le sens.
Dans cette contre-académie du neuf et du sens admis, le poète tente de “tuer le temps jusqu’au prochain sommeil”. Preuve que rien n’est jamais acquis à l’homme. Même celui qui sent et malgré tout espère là où il ne lui reste en lieu du lieu que ses mots cassés.
Ils percent les pensées nocturnes qu’il s’agit de fort niquer dans un jus de jusant pour user l’acquis jusqu’à la corde. Tressée de pseudo-vérités, elle ne sert qu’à se pendre au nom des émotions “astrosphériques” qui se trompent d’orbites.
En une telle porosité, la nuit devient une péninsule, un “outrage”. Elle voudrait faire croire qu’à son bout réside un pain mystique auquel, le jour venu, chacun rêve de mordre en le distinguant derrière la vitre d’un boulanger métaphysique par des visions hypermétropes de l’esprit. Mais Guillot ne se fait pas d’illusions là-dessus. Droites dans leurs bottes ou montées sur ses “ergo sum”, toutes les illusions d’optique mentale sont réduites à des mandalas ramenés à l’état de bout de ficelle.
Tel un préraphaélite d’obédience obscure, le poète - par le trou de sa bouche — ouvre au coeur ses entrailles et montre ce qui pue le martyr.
Dès lors, parler veut dire encore. Là où remontent les vomissures mystiques sous un ciel bas et lourd.
jean-paul gavard-perret
Paul Guillot, L’Hyperesthésie, Les éditions de la salle de bains, Rouen, 2019 — 5,00 €.