Megumi Igarashi (aka Rokudenashiko — mauvaise fille) est une artiste plasticienne japonaise née en 1972. Elle s’est spécialisée dans l’art de la vulve en diverses matières et représentations. Et dans un but précis : «J’oeuvre pour renverser la vision masculine du sexe féminin dont on ne parle qu’à travers le prisme du concept d’obscénité ».
Cela ne l’a pas empêchée — au contraire– d’être arrêtée, inculpée en 2014 et incarcérée six mois pour avoir enfreint la loi relative à l’obscénité, en moulant son sexe puis en le scannant en 3D afin de construire un canoë-kayak.
Non dénué d’humour, ce travail gêne forcément une société patriarcale vissée sur ses tabous que certains artistes tentent de casser. Mais, au Japon comme dans beaucoup de pays, la représentation du sexe féminin est interdite : il est flouté, pixélisé sur les photos, les dessins et les films même si la pornographie est largement diffusée. Et ce, à l’inverse du pénis fêté chaque année dans un improbable festival du « phallus de fer » à Kawasaki.
Médiatisée, cette arrestation a permis de mettre en évidence les contradictions d’une société et ses a priori au sujet de la femme. L’artiste propose donc une digression « pop culture » des plus réjouissantes. Elle la poursuit avec ses maquettes de paysages pubiens, ses coques de smartphone, ses bijoux, ses gâteaux et encore sa marionnette nommée Gundaman, qui fait référence à une figure à succès de l’animation japonaise.
Désormais, son manga incriminé est édité partout dans le monde. Belle récompense. Et parfaitement justifiée.
jean-paul gavard-perret
Rokudenashiko, L’Art de la vulve, traduction : Ariane Bataille, Editions Presque Lune, Rennes, 2018, 184 p. — 20,00 € .