Sylvain-René de la Verdière, La civito de la nebuloj

L’introu­vable cité des brumes

Les livres en Espe­ranto sont plu­tôt rares. Mais le choix d’une telle langue n’est pas ano­din. Tout comme ne le sont pas les illus­tra­tions de Poulpy. Elles redonnent à leur défi­ni­tion le sens pre­mier de sou­li­gne­ment. Celui d’un poème fan­tas­tique qui devient l’histoire d’une cite (englou­tie ?) où “des créa­tures hon­teuses fraient la mélan­co­lie des ruelles étran­glées” entre des tours de S-F et des ruines ances­trales. Sans cesse le pay­sage se méta­mor­phose. La cité devient femme ten­ta­trice, ses habi­tants des “vapeurs noc­turnes” . A leur tête et pour maire “le Roi Chaos”.
Dans un tel lieu tout est pos­sible. Le pire bien sûr mais son inverse aussi. De toute façon, en une telle ana­mor­phose, l’impensable est pos­sible. La rivière n’a pas besoin de quai : elle coule dans les nuages pour ali­men­ter de ces his­to­ries d’eau les rêves absurdes des vivants, des obsi­diennes et de gar­diens golems. Ils sont ali­men­tés sans cesse de la folie de leur ima­gi­na­tion ana-Morphique. Car, au-delà des murs  de la cité, une indus­trie par­ti­cui­lère bat son plein, les che­mi­nées aux touf­feurs de chi­chons dégorgent les rêves de cette fabrique des songes.

Ici il n’existe pas de temple, Dieu n’est plus. Il y a d’autres pays ou  lieux pour ça. A sa place il existe un vieillard, un reclus d’un fau­bourg obso­lète.  Au “Un” est pré­féré le mul­tiple des divins antiques qui mêlent l’éther au tel­lu­rique sans faire appel à l’enfer ou au para­dis. Il sont ici sur place. Sans même le besoin d’un recours à la terre nour­ri­cière. Il y a belle lurette qu’elle ne donne plus de fruits.
Mais la  cité des brumes est bien­tôt introu­vable. Preuve qu’il s’agit sans doute de la plus belle des femmes. Au lec­teur “d’inventer l’étincelle de cette étoile noire”. Au risque de tout perdre dans l’incendie du siècle.

jean-paul gavard– perret

Sylvain-René de la Ver­dière,  La civito de la nebu­loj, Illus­tra­tion de Poulpy, tra­du­cyion de l’esparanto par Céline Matière, Z4 édi­tions, 2017, 64 p. — 8,00 €.

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Filed under Chapeau bas, Poésie

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