Florence Andoka, Hagiographie imaginaire de Marion Bataillard

Histoires du corps

Marion Bataillard par son approche du por­trait et de l’autoportrait (au-delà de la res­sem­blance) trans­forme ses modèles en icône sans regim­ber (au contraire), pour les situer dans des poses tri­viales. Existe un face-à-face entre le regar­dant et le regardé. Et Flo­rence Andoka donne à cette œuvre « avec organes » un regard par­ti­cu­lier. La phi­lo­sophe éloi­gnée de tout cor­set épis­té­mo­lo­gique et doc­to­ral ose donc une tra­ver­sée des plus imper­ti­nentes et sub­tile.
« Ecou­tons »-la : « Comme la lit­té­ra­ture a donné des romans à clés, Marion Bataillard a peint dans sa propre pein­ture une toile de Marc Molk. Des toiles jumelles, comme des âmes sœurs. Le retour du Cara­vage, c’est ici Judith déca­pi­tant Holo­pherne, devenu his­toire de cœur actuelle ou can­dau­lisme mor­bide et inversé. Qui n’a jamais rêvé de cou­cher avec sa copine et une autre fille ? On pour­rait ensuite exé­cu­ter cette nou­velle maî­tresse, mettre sa tête dans un sac plas­tique, ça ferait de la nour­ri­ture pour le chat qui est à court de Whis­kas.».

Tout est dit — et super­be­ment dit — de ce qu’engagent l’œuvre et son mys­tère péné­trant dans ce mixage d’onirisme et de natu­ra­lisme. Loin du psy­cho­lo­gisme, la peintre pénètre des lieux où la conscience fait (volon­tai­re­ment ou non) défaut. La pein­ture semble même ce qui s’oppose à elle afin d’offrir un autre monde et une autre explo­ra­tion dans un tra­vail de sub­jec­ti­va­tion où la réa­lité quoique pré­sente n’est plus domi­nante. Marion Bataillard révèle tout un jeu de sen­sa­tions et d’émotions dans le jeu – qui peut s’avérer dan­ge­reux – du désir. Chaque per­son­nage se laisse entraî­ner par ses organes comme en ceux de l’autre.
Dans cette pein­ture tout dans le corps peut deve­nir éro­gène même lorsque la réa­lité est macu­lée de sédi­ments internes. Ils rejaillissent en une sorte de maté­ria­lité mais qui n’a rien à voir avec ce que Bacon en fait. Nulle vio­lence même dans la souf­france psy­chique car nul désir maso­chiste. Mais juste la pas­sion et ses consé­quences au moment où, tout en jaillis­sant, la réa­lité se délite.

jean-paul gavard-perret

Flo­rence Andoka, Hagio­gra­phie ima­gi­naire de Marion Bataillard, Lit­té­ra­ture Mineure, Rouen, 2017 — 8,00 €.

1 Comment

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One Response to Florence Andoka, Hagiographie imaginaire de Marion Bataillard

  1. andoka gaston

    J ai lu avec beau­coup d emo­tion votre outrage lite­raire je te feli­cite beau­coup pour ta reus­site signe gas­ton andoka

    J attends ton appel au numero +242066663155

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