Impertinent, Jean-Pierre Chambon du merle perçoit l’essentiel. A savoir ce qu’il ne dit pas puisque c’est la loi de la collection « Apostilles » créée par Danielle Berthet. Du texte, il ne reste que sa ruine — la règle du jeu étant de ne conserver que les notes de bas de page… Nous ne sommes donc plus obnubilés par ce que généralement imposent des lignes pas forcément maritimes en des développements plus ou moins vagues qui assomment.
Pour chanter ce phénix des hautbois qu’est le merle « distrilleur » de sons dès l’aube et de derrière les fagots, Chambon aux pépiements à la Merleau (Ponty s’entend), préfère citer Wallace Stevens lorsqu’il rappelle que père et mère de tous vices et le zozio noir ne font qu’un. Ce n’est pas beaucoup diront certains. Mais, personnellement, nous nous satisfaisons de ce peu.
D’autant que le moindre pépiement chambien maquille les bavardages en laissant le texte en apesanteur. L’apostille comme l’oiseau moqueur s’insinue entre les ramures, affleure jusqu’au fracas, recule à l’approche du pèlerin là où l’auteur grenoblois (il fait partie du gratin dauphinois poétique sans un faire un fromage) donne des coups de pieds de l’âne dans les taillis pour y traquer un morceau de ciel.
Chambon prouve que ce qui est à lire n’est que lisières et doit s’éloigner des forêts du sens. Excentré, le texte permet de se sentir à l’aise. Il n’a jamais été plus clair et permet de respirer à l’aise en son existence d’ouvroir potentiel. Loin d’un papier peint au motif de feuillage, ce qui reste de mots court telle une ronce. Le lecteur goûte un tel retrait.
L’absence patente devient l’idéal pour nous requinquer. Grâce à ses seules apostilles, le texte est enfin accueillant. Il donne ce qu’on attendr sans passer par les diagnostics que les bavards confrères du poète prédisent en utilisant des termes parfaitement inutiles. Le constat est une évidence : en un tel Chambon tout est bon.
jean-paul gavard-perret
Jean-Pierre Chambon, Il y a des merles partout, Atelier Danielle Berthet, Aix les bains, 2017.