Un bel hommage aux polars noirs
Dans ce huis clos, le scénariste affine les relations entre des individus que seul rassemble et réunit l’appât du gain. Il mêle différents sujets qui s’intègrent parfaitement dans le paysage rural comme l’exode des filles, compensé en partie par l’arrivée de jeunes femmes venues d’Europe centrale, l’élevage des taureaux et le commerce de l’insémination. A cela, il ajoute l’épizootie dite de la vache folle d’où le double sens du titre. Des dialogues truculents donnent l’essentiel car beaucoup de sentiments, d’émotions s’expriment par l’image.
Un graphisme d’une grande pureté en bichromie pour un effet révélateur accompagne le tout.
Ferrand, José, Romuald et Cassidy préparent un braquage. Ferrand et José se connaissent depuis longtemps. Ce dernier n’est pas spécialement heureux de faire équipe avec Cassidy, une jeune femme au franc-parler. Ils dévalisent la BK masqués pour se protéger des fumigènes qu’ils utilisent pour neutraliser les forces de gendarmerie et partent se mettre au vert, pour un mois, dans la ferme de l’oncle de Ferrand qui l’exploite avec son fils Jacky. Un lourd contentieux règne entre les cousins car Jacky s’empresse de lui donner un coup de poing sur le nez dès qu’il le voit.
La vie communautaire s’organise tant bien que mal, Romuald et Cassidy faisant lit commun, alors que les deux autres forment un vieux couple, ensemble depuis quinze ans. L’installation reste rustique, les retrouvailles de Ferrand avec le passé, un ancien ami devenu gendarme, les liens amoureux, les relations avec le monde rural, les flash-backs qui expliquent certaines attitudes… Et puis l’envie de sortir de la ferme. Une succession de situations qui amène un déchaînement de passions jusqu’à une conclusion brutale.
Un très bel hommage aux romans et films policiers des années 1960, à la gouaille d’un Michel Audiard, au graphisme des titres des collections du Fleuve Noir, aux thèmes chers à une littérature où les truands avaient encore une “morale”, aux films d’un Lautner, au phrasé d’un Bernard Blier et d’un Lino Ventura.
Mort aux vaches est un régal pour la qualité de l’histoire, des dialogues et du graphisme et offre un beau moment de nostalgie.
Voir quelques planches : http://www.futuropolis.fr/planche.php?id_article=790400&view=1&first=1
serge perraud
Aurélien Ducoudray (scénario) & François Ravard (dessin), Mort aux vaches, Futuropolis, septembre 2016, 112 p. – 19 ‚00€.