Entretien avec l’auteur de Hygiène Rose, Chapitre 1 :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
La certitude de plus en plus ancrée que je n’ai rien de bon à attendre des rêveries et des pensées qui sont l’émanation du demi-sommeil. Les divagations de la pré-veille sont une léthargie, un cauchemar qu’à tout prix je dois fuir.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Ils sont devenus possibles. Désormais, ce sont plutôt des désirs qui ont la couleur des rêves.
A quoi avez-vous renoncé ?
A toutes les ambitions des adultes qui ne sont pas les rêves de l’enfance.
D’où venez-vous ?
D’un grenier assez quelconque, sans grand intérêt, et qui m’aurait tué d’ennui si une petite échelle ne m’avait permis de m’échapper.
Qu’avez-vous reçu en dot ?
Cette petite échelle sur le toit, et puis l’humour aussi.
Un petit plaisir – quotidien ou non ?
La marche à pied, et manger des sucreries qui gâtent les dents.
Qu’est ce qui vous distingue des autres écrivains et artistes ?
Peut-être de n’être ni vraiment un écrivain, ni vraiment un artiste. Ou bien le maître ou bien un personnage de l’univers que je crée. Ou bien les deux. Enfin j’y travaille.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Je crois que c’était l’illustration de la pochette de l’album « Fear of the Dark » d’Iron Maiden, entrevue au supermarché quand j’étais gamin.
Et votre première lecture ?
Les malheurs de Sophie, Les Petites filles modèles, Les Vacances, trilogie de la Comtesse de Ségur, dévorée au cours d’un été à La Ciotat. Je devais avoir dans les 10 ans. Je lui dois beaucoup.
Pourquoi votre attirance pour l’écriture « plurielle » (graphique, dessins, photos, etc) ?
C’est de cette manière que j’essaye de faire vivre, respirer et se développer un univers, avec son iconographie, ses légendes, ses sons et son histoire. J’ai, au cours de mon existence, collecté une foule d’images. Certaines sont de ma création, d’autres de la récupération et sont là pour mémoire. Au fil du temps, par ce que mon esprit projette sur elles, ces images deviennent en quelque sorte mythiques. En m’accompagnant et me guidant, elles constituent le spectre de mon univers. Et quand elles sont chargées de ce pouvoir talismanique, c’est sous leur dictée que j’écris.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Plein de trucs. Le Métal est très important pour moi. Le black, le doom, le heavy… ainsi que toute l’iconographie de ces mouvements issus de la culture populaire me nourrissent depuis toujours. Le Rock aussi. Des chansons pop tristes et violentes. Tout en fait sauf la musique classique qui ne m’évoque rien.
Quel livre aimeriez-vous relire ?
Ulysse de Joyce est un livre que je pourrais relire à l’infini. Les Anges de l’histoire de Frederika Fenollabbate, dont j’ai contribué à la publication en 2013. Sinon je n’aime pas trop relire les livres.
Quel film vous fait pleurer ?
« La Party » de Blake Edwards.
Quand vous vous regardez dans un miroir, qui voyez-vous ?
Quelque chose d’un peu informe et de plutôt rigolo.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A mes amis. Je suis incapable d’aucune forme de sincérité dans l’écriture. Sauf dans le cadre de la fiction.
Quelle ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Ma chambre d’enfant à Paris.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Alice Cooper.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un exemplaire de l’édition Hachette de 1861 de L’Enfer de Dante, illustrée de gravures de Gustave Doré. Une merveille d’un format démesuré et dément, que j’ai usée jusqu’à la corde quand j’étais gosse à la campagne. Faute de place, ou bien pour d’autres raisons plus obscures, je n’ai jamais osé le racheter.
Que défendez-vous ?
Entre autres en essayant d’en vendre le plus possible, l’existence de livres libres et originaux, qui seraient conçus et publiés tels que leurs auteurs les rêveraient. Leur possibilité d’exister, leur indépendance et leur capacité à être accessibles au plus grand nombre. C’est pour cela que j’ai créé en 2013, avec mes deux compagnons, le Réseau Tu Dois.
Que vous inspire la phrase de Lacan : « L’Amour c’est donner quelque chose qu’on a pas à quelqu’un qui n’en veut pas » ?
Bof.
Que pensez-vous de celle de Woody Allen : « La réponse est oui mais quelle était la question » ?
Bien sûr ! Il faut toujours dire oui ! Enfin le plus souvent possible. Dire non ferme les voies de communication d’entrée de jeu. Et après il faut assumer. De toute façon je suis un vieux fan de Woody.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
La date de mon anniversaire peut-être ?
Entretien réalisé par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 17 décembre 2015.