Chris von Wangenheim : saveurs de souffre
Chris von Wangenheim a métamorphosé la façon de scénariser la mode. Sa monographie explore son travail pour des magazines comme Interview, Harper Bazaar et Vogue de 1968 à 1981. Le photographe aime jeter le trouble et en déplacer les symptômes. Surgissent divers types de défaillance avec le (beau) risque de s’y perdre. Il utilise une combinaison de violence et de sexualité crue en proposant visuellement le danger au sein d’un style de vie glamour mais rempli d’aventure et d’humour. Le plus souvent grâce à la nécessaire (mais suffisante) exploitation du déshabillé. Dans de telles prises, la vie est parodique et chaque image donne envie de dire au photographe et à ses égéries : « Pardonne leur, mon dieu, ils ne savent pas ce qu’ils font ».
Néanmoins, Chris von Vangenheim appelle à l’énergie des femmes et leur volonté (apparente) de cultiver une certaine hostilité. Les silhouettes s’ennivrent de leur propre alcool aux saveurs d’eros. Elles deviennent ce qu’elles sont dans leur secret et par bonds dans l’illimité. Chaque corps appelle la provocation en jaillissant à l’air libre dans un éther sans rive ni innocence. D’où, comme disait le bon Oscar (Wilde), l’importance d’être constant là où l’être en suspens reste toujours plus proche du désir que de la détresse.
Ce qui survient signe une ouverture du récit « photographique ». Les modèles affirment leur rayonnement ardent en noir et blanc ou en couleurs.
jean-paul gavard-perret
Chris von Wangenheim, Gloss, Rizzoli, 2015.