Ted Kotcheff, Rambo (First Blood)

Les tour­ments du Rambo war­rior

Synop­sis
John Rambo est un héros de la Guerre du Viet­nam errant de ville en ville à la recherche d’un de ses anciens com­pa­gnons d’armes. Alors qu’il s’apprête à tra­ver­ser une petite ville pour s’y res­tau­rer, le shé­rif Will Teasle l’arrête pour vaga­bon­dage. Empri­sonné et mal­traité par des poli­ciers abu­sifs, Rambo devient fou furieux et s’enfuit dans les bois après avoir blessé de nom­breux agents. Tra­qué comme une bête, l’ex-soldat est contraint de tuer un poli­cier en légi­time défense. Dès lors, la police locale et la garde natio­nale déploient des moyens consi­dé­rables pour retrou­ver le fugi­tif. Le Colo­nel Traut­man, son men­tor, inter­vient et essaie de dis­sua­der les deux camps de s’entre-tuer pen­dant que Rambo, acculé et blessé, rentre en guerre contre les autorités.

L’étrange étran­geté ou les tour­ments du Rambo war­rior
Tout com­mence dans le calme d’une petite ville enso­leillée du middle-west amé­ri­cain. A la recherche d’un de ses ex-compagnons d’arme au sein d’un esca­dron d’élite, John Rambo apprend, dépité, la mort de son ami des suites d’un can­cer (dû à l’« agent orange », un défo­liant toxique lar­ge­ment uti­lisé au Viêt­nam). Repre­nant la route, l’homme aux che­veux longs et au faciès taci­turne ren­contre alors un shé­rif local qui le prend pour un vaga­bond en train de tra­ver­ser « sa » ville à pied. Un étran­ger, qui plus est, qui porte ˗ on va dire : fiè­re­ment ˗ une veste mili­taire avec la ban­nière étoi­lée bro­dée : mais ce qui semble un hon­neur enfui pour l’intrus s’apparente plu­tôt, on le pressent, à une infa­mie pour le repré­sen­tant de l’ordre. Rac­com­pa­gné pour cette (mau­vaise) rai­son et sur fond d’agressivité latente aux portes de la ville, déci­dé­ment aussi peu accueillante que l’Amérique entière, celui qui est un vété­ran de la guerre du Viêt­nam décide contre toute attente d’y reve­nir.
Et c’est le début de la fin, de la vio­lence cres­cendo à venir, là où s’enracine le titre du film au sens propre : First Blood ren­voie en effet à une phrase lan­cée plus tard par Rambo pour jus­ti­fier ses actions : « They drew first blood, not me ! » (signa­lant qu’il n’a fait que répondre à la pre­mière offense qu’on lui a infli­gée ici). Pas facile pour­tant de déter­mi­ner ce que désigne ce « first » : l’injustice polie tein­tée de xéno­pho­bie du shé­rif Teasle (par ailleurs vété­ran lui-même de la guerre de Corée) ou l’entêtement de Rambo ins­crit dans un méca­nisme réflexe qui n’entend pas s’en lais­ser conter sur la seule foi de sa crasse appa­rence ?
Si ce trouble com­men­ce­ment et cette déli­cate impu­ta­tion de la faute ori­gi­nelle connotent plu­tôt la décou­verte mutuelle d’un étran­ger par un autre, la consé­quence, elle, est plu­tôt lim­pide : en sus de la déres­pon­sa­bi­li­sa­tion réci­proque reje­tant sur l’autre l’origine du « pre­mier sang », l’escalade de la vio­lence entre les deux par­ties anta­go­nistes, loin­tain écho de la méta­stase du bour­bier viet­na­mien, est inévi­table. De même que le spec­tacle refoulé de la guerre écla­tant désor­mais sur le sol rea­ga­nien de cette pai­sible com­mu­nauté du Kentucky.

Le droit à/de la vio­lence : la guerre feu­trée
Cette vio­lence est celle d’individus qui, pour reprendre la leçon de Hegel dans ses Prin­cipes de la Phi­lo­so­phie du Droit, en viennent à confondre ˗ de manière pré­ju­di­ciable ˗ le droit de l’Etat et la ven­geance sub­jec­tive, cha­cun cam­pant sur le sen­ti­ment de son « bon droit » à rétor­quer à l’attaque de l’autre. Une pro­pen­sion amé­ri­caine à la « vio­lence jus­ti­fiée » qui com­mence au Viêt­nam avant de se retour­ner, de retour au pays, contre ceux qui s’y sont adon­nés et pour cela sont condam­nés à être des mar­gi­naux, des  déclas­sés en butte à la bêtise et aux pré­ju­gés de la doxa (« Là-bas, lâche Rambo, je condui­sais des chars qui valaient des mil­lions, ici je ne peux même pas être gar­dien de par­king. »). Com­ment donc celui qui s’est sacri­fié pour sa patrie pourrait-il bien être déchu par celle-ci ?

Au moins peut-on consta­ter que l’ancien sol­dat, mal­mené par les ser­vi­teurs de la loi, a assez peu le choix : être pri­maire mais droit, patriote jusqu’au bout du poi­gnard de sur­vie, orienté et hanté ˗ pour ne pas dire : pré­dé­ter­miné — par ses nom­breux trau­ma­tismes (cf. la scène où il revit les tor­tures Viêt-Cong quand on veut le for­cer au début du film à être propre), sa situa­tion ne peut-être qu’une décla­ra­tion de guerre. Un casus belli ne pou­vant que le pous­ser à lais­ser écla­ter au grand jour la rage qui l’habite et donc à incar­ner le refoulé de ses com­pa­triotes qui, à l’instar du shé­rif et de ses hommes le reje­tant, l’ont trans­formé à son corps défen­dant en paria. La com­mu­nauté, pour sa part, toute à son « oubli volon­taire », refoule l’idée de guerre, ne voyant ˗ parce qu’elle le veut bien ˗ dans le déploie­ment mas­sif des forces (la garde natio­nale puis les mili­taires) des­ti­nées à tra­quer le fugi­tif qu’une élé­men­taire opé­ra­tion de « main­tien de l’ordre ». Cri­tique de la société de com­mu­ni­ca­tion et du repor­tage télé, T. Kot­cheff insère d’ailleurs dans le décor, à titre de nor­ma­ti­vité, les jour­na­listes des pre­mières chaînes d’information en continu, venus cap­ter la légende. Tout cela ne sau­rait être si grave.

Ce dua­lisme tient à ce que, alors que la « sale » guerre du Viêt­nam s’est ache­vée depuis moins de dix ans, John Rambo est le sou­ve­nir in cor­pore d’un conflit et de ses hor­reurs dont le peuple amé­ri­cain, pré­ci­sé­ment, ne veut tou­jours pas prendre conscience ; une guerre qu’il refuse de recon­naître comme la sienne. Contre toute attente, le peuple amé­ri­cain n’a pas besoin de voir « ses morts » reve­nir des limbes de l’enfer asia­tique. Il n’est donc pas éton­nant que, par le biais de ses citoyens et de ses ins­ti­tu­tions, il « refoule », comme Freud le dit de toute notion ou idée irre­ce­vable socia­le­ment et mora­le­ment pour l’esprit, tout ce qui s’y rap­porte. De la même manière que le monde de l’après-guerre, après la décou­verte du géno­cide concen­tra­tion­naire nazi tel que le rap­porte Primo Levi dans Si c’est un homme, s’est mon­tré réti­cent à écou­ter les témoi­gnages des sur­vi­vants des camps de la mort.
Com­bat­tant hors pair, plu­sieurs fois blessé, tor­turé dans un camp nord-vietnamien, évadé, réin­té­gré dans l’armée puis démo­bi­lisé en sep­tembre 1973, Rambo se plaint d’avoir été lâché à la fois par la hié­rar­chie mili­taire, les hommes poli­tiques, l’administration amé­ri­caine, et sur­tout l’opinion publique, qui s’est retour­née contre la guerre. La chan­son du géné­rique final (« It’s a Long Road ») laisse bien entendre qu’il fau­dra beau­coup de temps pour sol­der la culpa­bi­lité impé­ria­liste des U.S… Atti­tude cou­pable de toute une nation que résume la der­nière et célèbre réplique du vété­ran mul­ti­dé­coré : « It wasn’t my war !… ». « C’était pas ma guerre ! C’est vous qui m’aviez appelé, pas moi ! ».

La honte de la guerre per­due ou le mau­vais infini
Certes donc, le conflit nais­sant nour­rit la soif de ven­geance de Rambo ˗ assi­mi­lable à la ven­geance « sub­jec­tive » dénon­cée par Hegel. Mais c’est sur­tout parce que ce der­nier est un sol­dat trau­ma­tisé, formé à se défendre contre l’horreur au Viêt­nam, forcé à faire l’apprentissage de la mort ˗ soit un citoyen qui s’est engagé pour défendre les valeurs de son pays (réunies à l’écran dans la figure du colo­nel Samuel Traut­man sym­bo­li­sant à la fois pater­na­lisme et morale) et, par­tant, les prin­cipes « objec­tifs », fon­da­men­taux de l’Etat incar­nant l’Universel de la Rai­son selon les Prin­cipes de la Phi­lo­so­phie du Droit.
Là réside prin­ci­piel­le­ment l’origine de ce First blood qu’on a sous les yeux (adapté par Ted Kot­cheff du roman épo­nyme en 1972 d’un vété­ran du Nâm, David Mor­rell) : l’entrée en guerre d’un Etat contre un autre Etat, la croyance, dans le sillage de Tho­mas d’Aquin en une « guerre juste » ou en une « juste cause », socle de la Jus­tice. Un conflit par­ti­cu­liè­re­ment meur­trier en la matière pour une Amé­rique sor­tant d’années dif­fi­ciles, mili­tai­re­ment et éco­no­mi­que­ment, en proie à de mul­tiples contra­dic­tions, à bout de souffle donc (et qui ne sor­tira pas gran­die au regard de ce qui demeure sa seule défaite mili­taire indis­cu­table : celle que lui infli­gèrent Ho Chi Minh et le camp com­mu­niste au Viet­nam). L’enseignant David Mor­rell pré­sente en ce sens son per­son­nage Rambo comme l’archétype de ses étu­diants reve­nus du Viet­nam, refu­sant de se sou­mettre à son auto­rité et frap­pés d’un mal à l’époque ignoré : le stress post-traumatique. Et le roman­cier de pré­ci­ser dans une post­face récente : « Mon inten­tion était de trans­po­ser la guerre du Viet­nam aux Etats-Unis ». Dont acte.

Ainsi, tan­dis que Fran­cis Ford Cop­pola (Apo­ca­lypse Now) et Michael Cimino (Voyage au Bout de l’Enfer) illus­trent au tra­vers de deux épo­pées excep­tion­nelles les retom­bées post-traumatiques de la guerre du Viêt­nam, Ted Kot­cheff met en avant dans son tel­lu­rique et sombre Rambo un sol­dat expé­ri­menté mais méprisé, envoyé au front contre son gré, tra­qué telle une bête par sa propre patrie qui le rejette, manière de cla­mer que toute guerre est « injuste » par essence et qu’il convient céans de la dénon­cer par l’absurde, les prin­cipes hégé­liens uni­ver­sels de l’Etat consti­tuant par­fois un mau­vais infini qui broie les vel­léi­tés indi­vi­duelles, rédui­sant de facto le libre arbitre à n’être qu’un point par où passe de toute néces­sité la courbe géo­mé­trique de l’histoire, rame­née à celle du déploie­ment de l’Esprit en tant qu’Absolu pour le phi­lo­sophe de Iéna.
Une notion de « jus­tice » peu concep­tuel­le­ment arrê­tée et qui varie d’un indi­vidu à l’autre, foin de tout droit dit « posi­tif », au gré de ses besoins et de ce que les cir­cons­tances imposent. Là où Voyage au bout de l’enfer s’adresse à une Amé­rique pansant/pensant ses plaies mais main­te­nant ses échecs à l’extérieur (à Saï­gon notam­ment) pour ne pas avoir les mains trop sales, le sur­vi­val violent qu’est Rambo, qu’on peut rap­pro­cher pour son éner­gie sans fio­ri­tures de l’ Apo­ca­lypto de Mel Gib­son, pré­fère laver le linge sale en famille, réin­té­grant ces échecs à l’intérieur de la nation, au vu et su de tous. La guerre, Rambo va la trans­fé­rer de la jungle du Viet­nam à l’Amérique pro­fonde, retour­nant à la nature sau­vage pour com­battre l’armée amé­ri­caine par la ruse et l’expérience acquises jadis au prix fort sur le ter­rain. Comme chez Cimino tou­te­fois, la vio­lence phy­sique vaut sur­tout ici comme miroir, cathar­tique et dra­ma­tique, de la vio­lence psychologique.

Une folie pou­vant sou­vent en cacher une autre, l’oisiveté et le déni de la petite bour­gade iro­ni­que­ment appe­lée Hope (« l’espoir ») du shé­rif Teasle se font le cata­ly­seur de la colère et du déses­poir mélan­co­liques d’un homme rendu fou par la kyrielle des sévices connus au front. Ni sau­veur ni héros, Rambo l’anti-héros est juste un homme qui veut sur­vivre ˗ a for­tiori de retour du front. Qu’on se le dise, la (petite) guerre per­son­nelle ex nihilo que mène l’ancien béret vert qui, loin de poser à la vic­time expia­toire, décide de se dres­ser contre tous, sera aussi des­truc­trice et infon­dée que la (grande) guerre natio­nale menée au Viêt­nam.
Car l’essentiel dans le film de Kot­cheff, vision sans conces­sion d’une cer­taine Amé­rique ran­gée un peu vite dans la caté­go­rie du film d’action sim­pliste au réa­lisme digne d’une série B, porte bien sur le par­cours d’un homme en détresse. Un homme une quête de la recons­truc­tion de son huma­nité per­due dans un conflit, quel qu’il soit, dont il ne veut pas. Comme le réa­li­sa­teur l’atteste, « en 1982, le public amé­ri­cain a com­pris que les vété­rans du Viet­nam avaient été trai­tés mes­qui­ne­ment, qu’ils étaient les boucs émis­saires de leurs sen­ti­ments néga­tifs sur la guerre. » Rai­son du suc­cès du film, la mau­vaise conscience amé­ri­caine qui n’a pas su accueillir ses boys han­tés par un conflit déses­pé­rant et sans fin lors de leur retour, pré­fé­rant oublier ses fils res­tés au front, trouve dans Rambo un exu­toire qui vient court-circuiter sa mémoire. Ladite mau­vaise conscience amé­ri­caine veut par voie de consé­quence que, au moins sur l’écran, celui-ci soit épar­gné (il meurt, exé­cuté par son supé­rieur hié­rar­chique, le colo­nel Traut­man, dans le roman de D. Morell).

“Homo homini lupus“
Vêtu d’une toge im-monde, ce qu’il reste de l’homme John Rambo repré­sente la conscience cras­seuse de l’Amérique de Rea­gan. Il est capable d’une grande bru­ta­lité schi­zo­phrène une fois l’hallali lancé, non pas gra­tui­te­ment mais parce que son l’humanité même est mena­cée par ses propres core­li­gio­naires, ceci témoi­gnant sans ver­gogne com­bien, selon la for­mule de Hobbes, emprun­tée à Plaute, dans le Lévia­than (« Homo homini lupus »), l’homme peut être « un loup pour l’homme » quand les indi­vidu sur­vivent dans un envi­ron­ne­ment natu­rel de guerre géné­ra­li­sée au lieu de vivre dans une société orga­ni­sée à même de pro­mou­voir la paix.
Et le voici, dans un contexte fai­sant son­ger aux Chasses du comte Zaroff (1932), sous un temps exé­crable, loin de l’image du citoyen modèle du Contrat social cher à Rous­seau (car les rap­ports humains appa­raissent ici depuis le début insup­por­tables, tirant plu­tôt du côté de « l’insociable socia­bi­lité » évo­quée par Kant dans L’idée d’une his­toire uni­ver­selle au point de vue cos­mo­po­li­tique de 1784), arpen­tant la forêt muni de son seul cou­teau, taillant des piques, fomen­tant des pièges dia­bo­liques, recou­sant ses plaies avec les moyens du bord, dévo­rant une cuisse de cochon sau­vage tué au pal autour d’un feu de camp. Un milieu natu­rel à la James Feni­more Cooper qui exalte les sou­bas­se­ments pre­miers, pri­mi­tifs de l’humanité et, plus géné­ra­le­ment, de la mytho­lo­gie de la lit­té­ra­ture amé­ri­caine. Rap­pe­lons qu’on voit, de manière sym­bo­lique, le sol­dat pour­chassé accé­der à la forêt che­vau­chant une moto et quasi nu.
Ce croi­se­ment entre Robin­son, Tho­reau et Clau­se­witz (mélange explo­sif au demeu­rant !), trans­formé en bête de guerre féroce par la chasse à l’homme déclen­chée à son encontre, se trouve pour­tant hypo­sta­sié en guer­rier légen­daire lorsque le colo­nel Traut­man, son ancien men­tor appelé à la res­cousse, narre de façon théâ­trale les faits d’armes de son « pou­lain » et inverse les rôles, face à l’incrédulité du shé­rif, en le poin­tant comme le pré­da­teur et ses pour­sui­vants comme ses proies. Le monstre bel­li­ciste n’est qu’un homme trahi, aspi­rant à prendre sa revanche sur les forces fédé­rales et l’opinion publique. Mais une fois la « machine à tuer » lan­cée, le conflit ne s’arrêtera pas au pre­mier sang.

De la révolte à l’ultime sagesse
Ainsi la guerre du Viet­nam, en fili­grane jusqu’à pré­sent, se manifeste-t-elle sou­dain, au tra­vers de la figure non sans ambi­va­lence de Rambo, comme le véri­table cau­che­mar de Etats-Unis. Sans que l’on sache d’ailleurs si ce spec­ta­cu­laire « retour du refoulé », pour par­ler comme Freud, doit être loué (pour enfin être scruté) ou honni (pour évi­ter d’en être conta­miné). Il reste encore à éta­blir éga­le­ment si l’apologie de l’initiative indi­vi­duelle, de la jus­tice per­son­nelle et de la force suf­fit pour res­ti­tuer à notre Rambo war­rior son hon­neur patrio­tique perdu.
Une dif­fi­culté dont témoignent les suites don­nées au cinéma à ce pre­mier Rambo où l’ancien sol­dat, de vic­time se fait bour­reau, mas­sa­crant tous les « enne­mis » inter­pla­né­taires sur son che­min (repro­dui­sant l’attitude du shé­rif dénon­cée dans le 1er volet de la saga). Confon­dant la fin et les moyens, le vété­ran recon­verti en machine de guerre sombre dans le machia­vé­lisme facile, répon­dant par l’affirmative à la ques­tion phi­lo­so­phique (éthique et morale): la fina­lité visée peut-elle rendre juste, jus­ti­fier les moyens uti­lisé pour l’atteindre ?, ques­tion achop­pant sou­vent sur le cas par­ti­cu­lier de la guerre. La vio­lence qui s’empare de lui, trans­cen­dant toute réa­lité, le rend alors fou, l’enfonce encore plus dans la sau­va­ge­rie à la façon du colo­nel Kurtz de Apo­ca­lypse now. Une voie a priori sans retour .
Une chose est sûre pour l’heure : en se heur­tant dans First Blood de manière exem­plaire à la loi et à l’ordre de sa patrie, en rejoi­gnant mal­gré lui les lais­sés pour compte, les exclus, les êtres à l’intégrité phy­sique enta­mée et autres mar­gi­naux décré­tés hors norme, John Rambo vaut plus que comme une ébauche de guerre civile, malaise inté­rieur insoup­çonné. Il acquiert, par les sacri­fices consen­tis, comme une sagesse supé­rieure : l’esprit s’élevant grâce à la perte ˗ répé­tée ˗ du corps, ce « tom­beau » de l’âme stig­ma­tisé par Pla­ton, l’incapacité à jouer un rôle héroïque de l’ancien béret vert mul­ti­mé­daillé pro­voque chez autrui un regard des­sillé sur la guerre. Il était temps.

fre­de­ric grolleau

Rambo (First Blood)
Réa­li­sa­teur : Ted Kot­cheff (1982 — res­tau­ra­tion juillet 2015)
Avec : Syl­ves­ter Stal­lone, Richard Crenna, Brian Den­nehy
Genre : Action
Durée : 1H37mn

 

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Filed under Chapeau bas, DVD / Cinéma

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