Le Scorpion rebondit sur de nouvelles pistes
La bande dessinée d’aventures trouve toujours de nouvelles ressources et a encore de beaux jours devant elle. Avec Le Scorpion, les auteurs donnent à suivre une histoire mouvementée à souhait brillamment mise en images. Le Scorpion, ce bretteur né de père inconnu, poursuit sa quête sur l’identité de son géniteur. Après moult aventures, il comprend qu’il est le fils d’un Trebaldi, un membre de cette famille qui règne sur Rome et sur qui pèse une malédiction.
Mais, qui a violé Magdalena, sa mère ? Est-ce Orazio, cet homme qui ne supporte pas qu’on lui résiste ? Est-ce Cosimo, ce pape de plus en plus solitaire qui bascule dans la folie ? Mais, Orazio est assassiné par un homme tatoué sous l’œil gauche. Avant de le tuer, celui-ci veut connaître le secret des Trebaldi, le secret de cette neuvième famille qui s’est imposée à Rome après la conquête de Volsinii, la dernière cité étrusque à résister en 271 avant J.-C. Le Scorpion, devenu Armando Trebaldi, est dans les bras de la rousse Ansea Latal, promise à Nelio. Ce dernier n’accepte pas que ce bretteur soit devenu son frère. Près du cadavre en partie brûlé d’Orazio, ils découvrent un message ainsi libellé sur le mur : “Vous étiez cinq” Personne ne voit qui est ce cinquième. Puis, le tueur s’en prend, avec succès, à Cosimo le nouvel héritier en laissant sur le mur en lettres de sang : “Vous n’êtes plus que trois”.
Stephen Desberg manie l’art du suspense avec maestria. Sur plusieurs tomes, il a tout fait pour laisser supposer des liens entre son héros et la famille Trebaldi tout en pirouettant, au dernier moment, pour laisser supposer que ce n’était pas le cas. Cependant, à trop tirer, la ficelle ne va-t-elle pas casser ? Après la recherche du père, voilà le héros lancé sur le secret de la famille, ce secret qui lui a permis de prendre place à côté des huit familles gouvernantes et de perdurer à travers les siècles. Ce secret, qui se transmet de génération en génération, est pour l’instant perdu avec la mort brutale des deux piliers de la famille. Nelio en ignore tout, comptant sur une révélation soudaine.
Dans cet opus, la part d’Enrico Marini est prépondérante. Il co-scénarise le récit et assure, bien sûr, dessins et couleurs. Il offre des planches superbes? que ce soient celles relatives aux moments de détente du guerrier ou celles relatives aux nombreux combats. Il donne à son graphisme un dynamisme débridé, une tonicité remarquable. Il ose des vues, des perspectives très attrayantes lors, par exemple, de la longue poursuite de héros et de l’assassin, une poursuite riche en retournements.
L’apport de ce créateur d’images est essentiel. On serait presque tenté d’écrire que, sans Enrico Marini, Le Scorpion serait tombé dans l’oubli et n’aurait pas atteint un onzième épisode.
Ces remarques n’enlèvent rien à ce nouvel opus, dynamique, tonique, un régal pour les yeux.
serge perraud
Stephen Desberg (scénario), Enrico Marini (scénario, dessins et couleurs), Le Scorpion, tome 11 : « La Neuvième famille », Dargaud, novembre 2014, 48 p. – 11,99 €.