Les Forces vives (Simone de Beauvoir / Camille Dagen)

© Simon Gosselin

La tenace ins­crip­tion dans les méandres de l’existence

Une femme appa­raît en fond de scène, après avoir fran­chi une porte, elle tra­vaille ses che­veux, elle se rase. Le ton est donné ; on a affaire à des pro­pos ser­tis, d’intention inci­sive, qui visent “l’absence à tout”, cette mort que l’on conçoit sans la savoir, sans doute pour mieux connaître notre pré­sence, à quoi ? Il s’agit de modestes expé­riences de phi­lo­so­phie effec­tive, sai­sies au vif de la conscience. D’intenses sou­ve­nirs d’enfance et d’adolescence sont revé­cus de façon sonore et intime. 
Ainsi revoit-on une soi­rée, des inter­ro­ga­tions, des moments intimes d’inflexion exis­ten­tielle : omni­pré­sence de la reli­gion, quelques rap­pels his­to­riques des frasques natio­na­listes lors de la période de la Seconde Guerre mon­diale. La rup­ture avec la reli­gion est expri­mée comme une pos­ses­sion, puis par l’expérience de la solitude.

De façon abrupte, avant l’entracte, la guerre est pré­sen­tée dans son impro­ba­bi­lité, son fra­cas, sa mas­si­vité : le rideau noir tombe sur la scène ; elle ne sera pas mon­trée. La deuxième par­tie s’ouvre sur le devant du pla­teau, par des imi­ta­tions de nos lec­tures ; le pro­pos se fait ensuite plus inti­miste, res­ti­tuant la sidé­ra­tion face à la guerre d’Algérie, l’incrédulité face aux sou­bre­sauts de l’histoire. La rela­tion à Sartre est expri­mée dans son ori­gi­na­lité, sa vita­lité. La vieillesse est dite sim­ple­ment comme désen­chan­te­ment de la quo­ti­dien­neté.
Le spec­tacle est bien senti ; il déploie les intui­tions de Simone de Beau­voir, déve­loppe ses argu­ments de façon vivante, dyna­mique, dans une scé­no­gra­phie sobre mais inven­tive, faite de jeux avec des parois, de verre (sym­bo­li­que­ment, de cris­tal ou de métal) qui montrent alter­na­ti­ve­ment la rigi­dité puis la plas­ti­cité de notre ins­crip­tion tenace dans les méandres de l’existence.

chris­tophe giolito

 

Les Forces vives 

d’après Simone de Beau­voir
une créa­tion de Ani­mal Archi­tecte
concep­tion, écri­ture, mise en scène Camille Dagen
en colla­bo­ra­tion avec Emma Depoid

Avec Sarah Chau­mette, Camille Dagen, Marie Depoor­ter, Romain Gy, Hélène Morelli, Achille Reg­giani, Nina Villanova.

Scé­no­gra­phie cos­tumes Emma Depoid ; dra­ma­tur­gie Rachel de Dar­del ; col­la­bo­ra­tion artis­tique en jeu Lucile Del­zenne ; lumière Sebian Falk-Lemarchand ; com­po­si­teur Kas­par Tainturier-Fink ; vidéo et cadre Typhaine Stei­ner ; per­ruques Kuno Schle­gel­milch ; concep­tion dis­po­si­tif tech­nique Édith Biscaro.

Au Théâtre de l’Odéon Ate­liers Ber­thier 1, rue André Sua­rès 75017 Paris

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h.

Repré­sen­ta­tions sur­ti­trées en anglais les ven­dre­dis 29 novembre, 6, 13, 20 décembre.

Créé le 14 mars 2024 au Maillon – Théâtre de Stras­bourg / scène euro­péenne pro­duc­tion Ani­mal Archi­tecte, Comé­die – centre dra­ma­tique natio­nal de Reims copro­duc­tion Odéon-Théâtre de l’Europe, Maillon – Théâtre de Stras­bourg / scène euro­péenne, Le Phé­nix – scène natio­nale de Valen­ciennes pôle euro­péen de créa­tion, Centre dra­ma­tique natio­nal de Tours – Théâtre Olym­pia, Centre dra­ma­tique natio­nal Besan­çon Franche-Comté, Comé­die de Col­mar – centre dra­ma­tique natio­nal Grand Est Alsace, Fes­ti­val d’Automne à Paris avec le sou­tien du Fonds de pro­duc­tion de la direc­tion géné­rale de la créa­tion artis­tique, de la région Grand Est, de la ville de Stras­bourg avec la par­ti­ci­pa­tion artis­tique du Jeune théâtre natio­nal, du Jeune Théâtre en région Centre-Val de Loire et du fonds d’insertion de l’École du Théâtre natio­nal de Bre­tagne accueil en rési­dence au Théâtre 13 et à la MC93 – Mai­son de la Culture de Seine-Saint-Denis l’association Ani­mal Archi­tecte est sou­te­nue et accom­pa­gnée par la direc­tion régio­nale des affaires cultu­relles Grand Est – minis­tère de la culture, au titre de l’aide au conven­tion­ne­ment Ani­mal Archi­tecte est diri­gée en binôme par Camille Dagen et Emma Depoid en coréa­li­sa­tion avec le Fes­ti­val d’Automne à Paris.

D’après Le Deuxième Sexe, Cahiers de jeu­nesse, Mémoires d’une jeune fille ran­gée, La Force de l’âge et La Force des choses (tomes 1 et 2) de Simone de Beau­voir © Édi­tions Gallimard.

Tour­née 2025 12 au 21 mars – Comé­die, centre dra­ma­tique natio­nal de Reims 8 au 10 avril – Théâtre des 13 vents, centre dra­ma­tique natio­nal de Montpellier.

Leave a Comment

Filed under Théâtre

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>