Entre effacement, disparition et aspiration le sommeil ouvre un lieu neutre par excellence où se séparent et se mêlent la réalité et l’imaginaire. Chacun en dormant se heurte à son énigme dans la solitude qui met à distance l’autre — et soi-même aussi.
Dans ces moments, la vie avec l’autre est un mystère. Pour Heusbourg, elle pourrait peut-être « se résumer pour tout dire en une phrase ». Mais un doute subsiste puisque ce qui fut jusque là vécu est rêvé entre l’homme qui dort et ce qu’il connut mais dont ne reste que des fantômes.
Dormir pousse dès lors au crime de l’absence, au sein même de l’amour dans cette perte de soi du sommeil. Heusbourg rappelle en rêve ce qui fut et cela devient une manière de perdre l’abandon. Cela reste pourtant une vue de l’esprit dans les miasmes de l’inconscient : il ne se tait jamais : il insiste. Quitte à espérer que le sommeil concocte une autre vie à ce qui fut.
jean-paul gavard-perret
François Heusbourg, Une position pour dormir, Gallimard, coll. Blanche,2024, 112 p.- 16,00 €.