C’est lors d’un dimanche de 1214…
Avec Jean d’Aillon, la grande Histoire s’enrichit du souffle des romans de cape et d’épée mâtinés de thriller. Maître ès–romans historiques, il n’a pas son pareil pour combler, à sa manière tout en respectant une grande crédibilité, les lacunes laissées par les chroniqueurs au fil des siècles.
Le 14 aout 1193, le roi Philippe II, qui deviendra Philippe Auguste pour la postérité, épouse en second mariage la belle Ingeburge du Danemark. Le lendemain, il veut la répudier. Celle-ci ne se laisse pas faire, reste en France et mène, pendant des années, un combat juridique et spirituel. En 1211, elle est en résidence très surveillée à Étampes. Deux jeunes clercs tentent de la contacter. L’un d’eux, Knut de Lutzebbourg, est le fils de Dagmar, la nièce du roi de Danemark. Celle-ci veut avoir des nouvelles de sa cousine pour qui elle s’inquiète.
Un peu plus tard, dans l’année, Guilhem fait voile depuis l’Espagne vers Saint-Gilles en compagnie d’Egelina de Camville. Elle porte son enfant alors qu’il l’a combattue presque à mort quand elle se faisait appeler La Licorne. Guilhem est emporté dans le bouillonnement du mariage et entraîné dans une enquête pour démêler cette histoire de morts-vivants qui rôdent dans les cimetières de Paris.
C’est le rapprochement avec le roi, les dissensions avec la cour et la découverte d’intrigues mêlant, autour de la reine Ingeburge, Jean d’Angleterre, Otton IV, l’empereur du Saint-Empire germanique, le comte de Boulogne. Mais, c’est sur un champ de bataille que tout va se jouer…
Dans la fresque historique que le romancier construit, le personnage de Guilhem commence sa carrière à Marseille en 1198 bien que des textes évoquent sa jeunesse depuis l’année 1187. Jean d’Aillon ambitionne d’écrire, avec ce personnage, une saga se déroulant sous le règne de Philippe Auguste en quatre cycles comprenant chacun six titres.
Le premier cycle raconte l’existence du héros de 1187 à 1198. La suite se passe entre 1198 et 1203 où s’exposent les aventures du jeune chevalier devenu seigneur du domaine de Lamaguère. C’est un individu plus adulte, mais plus errant, que décrivent les romans dont l’action se situe entre 1209 et 1214. Il reste à découvrir sa vie en tant qu’époux et père de famille. Et l’auteur promène son personnage dans les hauts lieux de la France tels que Rouen, Montségur, Paris, mais aussi à Londres, Rome Wartburg, Cordoue…
Foisonnant de détails sur les équipements, les habillements, sur les liens entre les personnages historiques qui participent à l’action, sur la description précise des lieux, des cadres des aventures, ce roman s’inscrit avec bonheur dans la fresque. Jean d’Aillon revient sur cette nuit de noces qui a dû être bien sombre pour qu’un homme de 28 ans veuille se séparer immédiatement de sa toute nouvelle épouse. C’est un des mystères historiques non élucidés même si de nombreuses hypothèses tentent d’apporter une réponse.
Parmi la multitude de détails, tous pertinents, on remarque que les gens d’église participent aux batailles mais que, ne devant pas faire couler le sang, ils n’utilisent que des masses, des marteaux d’armes.
Ce roman, servi par une érudition sans faille, une écriture souple et nerveuse, une intrigue menée avec dynamisme, est un nouveau succès à inscrire à l’actif d’un auteur au précieux talent de conteur.
serge perraud
Jean d’Aillon, Les aventures de Guilhem d’Ussel, Chevalier troubadour — Bouvines 1214, Robert Laffont, coll. “Roman historique”, octobre 2024, 512 p. — 23,00 €.