Marie Bardiaux-Vaïente & Gaëlle Hersent, Calamity Jane

Quelle légende !

Martha Jane Can­nary est une des rares femmes que la mémoire his­to­rique a gar­dée de la conquête de l’Ouest des États-Unis. Pour­tant, les légendes sont nom­breuses, mon­tées au pinacle par un monde hol­ly­woo­dien en panne d’inspiration. Marie Bardiaux-Vaïente pro­pose une image plus conforme à la réalité.

Lorsqu’elle arrive à Dead­wood, en juillet 1876, Mar­tha est déjà connue par son sur­nom de Cala­mity Jane. Comme à son habi­tude, l’aventurière vit au jour le jour, boit sans rete­nue et raconte ses exploits, réels ou fic­tifs, à qui veut bien lui offrir un verre. Ayant connu une enfance misé­rable dans le Mis­souri, au milieu de XIXe siècle, elle a bâti son mythe de son vivant, celui d’une femme libre se moquant des conve­nances sociales dans un monde d’hommes. Tan­tôt cui­si­nière et lin­gère dans la mai­son close de son amie Dora DuFran, conduc­trice d’attelages ou encore infir­mière lors d’une épi­dé­mie de variole, elle fas­cine par son excen­tri­cité, son franc-parler et son cou­rage autant qu’elle dérange et fait scan­dale.
Et face à l’adversité, elle demeure fidèle à elle-même, une femme au grand cœur, éprise de liberté, qui n’hésite pas à venir en aide aux déshé­ri­tés et aux souf­fre­teux, ce qui lui vaut un autre sur­nom, de l’Ange de la misé­ri­corde.

Avec ce bio­pic, la scé­na­riste montre une figure emblé­ma­tique, un pur pro­duit de la conquête de l’Ouest et un per­son­nage unique par son éman­ci­pa­tion. Elle a, sans doute, été une femme libre dans un uni­vers macho au pos­sible, un uni­vers qui per­dure et s’enrichit avec pour figure de proue un obèse orange.
Le des­sin et la mise en cou­leur sont le fruit d’un tra­vail minu­tieux de Gaëlle Hersent, celle-ci usant d’un gra­phisme où le réa­lisme pré­do­mine. Cepen­dant, elle varie les styles, repre­nant, pour mettre en scène les exploits que raconte l’héroïne, le style des récits illus­trés tels qu’ils avaient cours à la fin du XIX et début de XXe siècle, avec les dia­logues et les réci­ta­tifs sous les images. Un dos­sier his­to­rique conçu par Farid Ameur, un his­to­rien spé­cia­liste de l’histoire contem­po­raine des États-Unis, com­plète heu­reu­se­ment les propos.

Les auteures pro­posent un album qui a le mérite de repla­cer une femme sin­gu­lière dans une époque où celles-ci n’avaient guère voix au cha­pitre, de plus dans une région pas vrai­ment faite pour qu’elles s’épanouissent, un por­trait plus conforme à la réalité.

serge per­raud

Marie Bardiaux-Vaïente (scé­na­rio) & Gaëlle Hersent (des­sin et cou­leur), Cala­mity Jane, Glé­nat, coll. “La véri­table his­toire du Far-West”, sep­tembre 2024, 56 p. — 14,95 €.

Leave a Comment

Filed under Bande dessinée

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>