Joan-Lluis Lluis, Junil

Le prix de l’émancipation

Joan-Lluis Lluis, bien que né à Per­pi­gnan, est de culture et d’expression cata­lane. Auteur d’une ving­taine de romans et d’essais, il a publié à Barcelone.

Junil, une fillette de huit ans voit sa vie bas­cu­ler quand un désastre dû au feu tue sa mère et ses frères. Pour son père, cette gamine est un bou­let qu’il méprise. Après quelques temps d’errance, ils partent pour Nyala, la capi­tale de pro­vince. Son père trouve enfin un tra­vail dans une librai­rie. Sa fille y besogne éga­le­ment toute la jour­née à col­ler des papy­rus pour en faire des livres.
Après un an, son père prend la place du libraire décédé dans des condi­tions qui semblent étranges à Junil. Les années passent jusqu’à un second désastre qui va bou­le­ver­ser la vie de l’adolescente. Un poème très sati­rique, attri­bué à son père, met en colère la famille la plus puis­sante de Nyala. Son père est tué et elle doit déta­ler pour res­ter en vie. Avec Tri­dent, un vieil esclave qui doit fuir aussi la colère des puis­sants et Lafas, un biblio­thé­caire, elle décide de par­tir vers le Nord, vers les terres peu­plées par les barbares…

Le roman­cier raconte alors une quête périlleuse, ame­nant le groupe de héros à ren­con­trer nombre de ces peuples dit bar­bares, à faire des décou­vertes par rap­port à leur propre vécu. Il détaille le par­cours de cette gamine, deve­nue jeune fille, s’attachant à le décrire le plus pré­ci­sé­ment pos­sible, mêlant avec habi­leté, sen­ti­ments, réflexions, émo­tions et actions. Le cadre de ce roman, qui prend le carac­tère d’un conte, se situe au début du pre­mier siècle de notre ère, aux confins de l’Empire romain.
La vie de Junil va être bou­le­ver­sée de belle manière quand elle ren­contre les écrits d’Ovide, la lec­ture de L’Art d’aimer est une révé­la­tion. Aussi, elle est bou­le­ver­sée quand elle apprend, avec bien du retard — les nou­velles cir­cu­laient à un rythme assez lent — l’exil du phi­lo­sophe en Scy­thie mineure, dans la ville de Tomis, le décret de l’empereur fai­sant détruire ses écrits.

En fin de volume, une brève des­crip­tion des prin­ci­paux per­son­nages de fic­tion, des écri­vains cités, des dieux nom­breux, com­plète posi­ti­ve­ment le récit. Avec ce livre, Joan-Lluis Lluis ins­talle tous les élé­ments d’un conte moderne, écrit un hymne à l’affranchissement, à la quête de la liberté, au pou­voir d’émancipation des his­toires. Il se lit avec avi­dité tant les per­son­nages sont décrits avec pré­ci­sion qu’ils soient atta­chants ou repous­sants, pour un récit mené avec brio.

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serge per­raud

Joan-Lluis Lluis, Junil (Junil a les terres dels bar­bars) tra­duit du cata­lan par Juliette Lemerle, Les Argo­nautes, “Rayon roman étran­ger”, août 2024, 288 p. — 22,00 €.

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