Les textes fondateurs du “planet opera”
Edgar Rice Burroughs n’est pas seulement l’auteur des aventures de l’inoxydable Tarzan qui fut, il est vrai, le socle de son œuvre puisqu’il lui consacra près de 25 romans et une quinzaine de nouvelles. Il explore d’autres genres d’aventures épiques tels que la Science-Fiction avec Le cycle de la Lune, celui de Vénus, l’aventure préhistorique avec Pellucidar, le Western… En 1922, malgré le succès rencontré par les romans, Burroughs estime que cinq livres pour Le Cycle de Mars sont suffisants. John Carter a rétabli la paix. Il coule des jours heureux avec l’éblouissante Dejah Thoris. Leur fils a conquis le cœur de la belle Thuvia.
C’est Hugo Gernsbach, le fondateur d’Amazing Stories qui réussit, à force de persuasion, de convaincre Burroughs à continuer le cycle.
En 1927, paraît Le Conspirateur de Mars (The Mastermind of Mars), d’abord, comme il était coutume à l’époque, en revue puis, plus tard en volume. L’auteur délaisse ses héros pour introduire Ulysses Paxton, un capitaine d’infanterie de l’armée des États-Unis qui, comme l’avait été John Carter, est aspiré pour se retrouver sur une pelouse écarlate face à Ras Thavas, le plus grand chirurgien de Barsoom, sorte de Dr Frankenstein capable de réussir toutes les transplantations. Paxton entre à son service et va vivre des aventures trépidantes.
Dans Le Combattant de Mars (A Fighting Man of Mars), l’auteur fait raconter, par la voix d’Ulysses Paxton, les exploits de Tan Hadron d’Hastor, un homme de guerre martien. Dans ce roman, il entremêle adroitement trois de ses principaux univers, celui de Tarzan, de Pellucidar et de Barsoom.
Avec Les Épées de Mars (Swords of Mars), c’est le retour du héros emblématique qui décide d’en terminer avec la sédition de Zodanga, trop longtemps tolérée. Burroughs introduit pour l’occasion un nouveau personnage en la personne de Fal Siva, un savant, constructeur d’un aéronef bien particulier.
Les Hommes synthétiques de Mars (Synthetic Men of Mars), le dernier grand roman du cycle, remet en scène Ras Thavas, le chirurgien de génie qui, à l’image d’un apprenti sorcier, a créé des hommes artificiels… difficilement contrôlables.
Llana de Gathol (Llana de Gathol) réunit quatre nouvelles reliées pour constituer un grand récit centré sur le personnage de la petite fille de John Carter.
Avec Le Cycle de Mars, Edgar Rice Burroughs invente le “planet opera” et structure un genre nouveau de la science-fiction moderne, exerçant une influence considérable sur toute une génération d’auteurs. Dans ce cycle, l’auteur met en scène, non seulement des héros courageux, mais tout un environnement. C’est d’abord la planète qu’il fait explorer, en long et en large par ses lecteurs. Puis, comme un ethnographe de l’espace, il décrit des races inconnues, des faunes et des flores extraterrestres avec moult détails et une cohérence remarquable. Il fait, également, de Barsoom (le nom local de Mars), un véritable personnage, partie prenante des intrigues. Dans son cycle, l’auteur ne se limite pas à multiplier les aventures de son héros de départ, mais construit une véritable saga familiale, ouvrant sur d’autres personnages représentatifs de la science-fiction.
Bien sûr, tous les romans font la part belle à l’action débridée, aux grandes fresques épiques. On peut regretter, cependant, le côté dichotomique de la quasi-totalité des personnages. Le Bon est chevaleresque, courageux, intrépide. Le Méchant est, comme son rôle l’assigne, fourbe, multipliant les traîtrises et les félonies.
Le cycle de Mars est construit avec minutie, avec des intrigues solides, des récits attractifs, des décors travaillés. Même si le mode narratif peut sembler vieilli, les tournures de phrases désuètes, les histoires sont si inventives, si riches en péripéties qu’on se laisse emporter, pour notre plus grand plaisir, par l’art de conteur d’Edgar Rice Burroughs.
serge perraud
Edgar Rice Burroughs, traduit de l’anglais (États-Unis) par Martine Blond, Le cycle de Mars, tome 2, Omnibus, 2014, 986 p. – 28,00 €.