Florence Andoka a eu toutes les facilités afin de trouver les mots pour dire ce qui l’intéresse ici : la sexualité. Le sujet s’y prête et les hommes ne se sont jamais privés de fantaisie lexicale faunesque autant par pudeur que plaisanterie grasse. L’objectif n’est de défendre ni l’animal, ni l’humaine condition. La seconde est souvent plus “bête” que le premier surtout lorsque là pulsion d’éros est là.
La poétesse s’en moque et le rappelle que les animaux qui nous hantent font notre délice et notre perte…
Elle permet à tout individu de devenir qui il est en le ramenant avec lucidité de l’idéalisme métaphysique vers l’abîme bestial. Florence Andoka en habile dompteuse des fantasmes rappelle qu’on n’est rien ni personne sinon les métaphores animales qui dessinent nos attributs. Et si notre corps est un bestiaire, ses galeries intérieures sont celles d’un jardin aux belles plantes à deux ou quatre pattes.
Les figures animales mythiques et domestiques papillonnent. Florence Andoka les recueille en poésies et contes. Il y a là des amours des plus illicites. Elles redonnent à l’animal sa place à part entière en une encyclopédie qui va du taureau de Pasiphaé au caniche à mémères qui n’ont pas totalement renoncé à certains plaisirs délétères (ou non).
Stendhal les oublia dans son De l’amour et celle qui vit pas très loin d’où Julien Sorel erra leur redonne sa place. Près des rives du Doubs, la poétesse pénètre dans les plis du coeur, les déchirures de l’âme, le paquet de nerfs où nos insectes libidinaux demeurent tapis. Et écrire devient l’occasion pour l’impertinente sorcière de mettre les vrais noms d’oiseaux (mais pas seulement) sur qui nous sommes.
Elle propose des diverses coagulations zoomorphes. Preuve que l’animal reste le seul ami. Ce n’est pas une aporie mais une germination.
Quel nom en effet donner à notre corps et ceux de nos partenaires sinon ceux qui remplissent notre animalerie et qui soulignent, parfois, notre degré zéro d’inconduite, tant sur le plan du langage que de nos actes ?
jean-paul gavard-perret
Florence Andoka, Trop bête pour toi !, Editions Mediapop, 2019 — 5, 00 €