La main de l’artiste comme celle de ses « personnages cherche la clé de l’existence. Ce qu’elle découvre ressemble parfois à un paradis terrestre, parfois un enfer comme le souligne l’aspect engagé des œuvres. Enan Burgos porte en lui le cheminement du désir et ne cesse de vouloir le revendiquer, parfois en soulignant de manière rude l’obscurantisme du monde. La peinture est forte, violente, chargée et en dehors de tout effet de décor. Elle ouvre les plastrons de la chair jusqu’à en montrer les entrailles au besoin. Le corps reste l’appel du futur et le souvenir d’un passé parfois léger et souvent douloureux. Preuve qu’Enan Burgos n’a rien d’un nostalgique.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
La lumière
Que sont devenus vos rêves d’enfants ?
Ils sont toujours là, c’est pour ça que je peins…
A quoi avez-vous renoncé ?
A la marijuana
D’où venez-vous ?
Du Sinú
Qu’avez-vous reçu en « héritage » ?
La poésie.
Qu’avez vous dû “plaquer” pour votre travail ?
Mon pays d’origine.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Jouer de la flûte, de la clarinette et du saxophone.
Comment définiriez-vous votre approche du corps ?
Ma peinture n’est pas une marque, elle change, évolue constamment…
Qu’est-ce qui vous distingue des autres artistes ?
Je ne suis pas face au paysage, je suis dans le paysage…
Quelle fut l’image première qui esthétiquement vous interpella ?
Un toucan posé sur le flamboyant en fleur dans le jardin de mon enfance.
Et votre première lecture ?
“Une saison en enfer” de Arthur Rimbaud.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Toutes les musiques, spécialement le jazz, mais je suis aussi un grand amateur de musique atonale et des Cantates de Jean-Sébastien Bach.
Quel livre aimez-vous relire ?
“Un coup de dés jamais n’abolira le hasard” de Mallarmé.
Quel film vous fait pleurer ?
Aucun. Je n’ai plus de larmes…
Qui voyez-vous dans votre miroir ?
Un homme seul.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A moi même.
Quel lieu a valeur de mythe pour vous ?
Le fleuve Sinú.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
San Juan de la Cruz, Góngora, Juan Ramon Jimenez, Mallarmé, René Girard, Toulouse-Lautrec, Pierre Bonnard, Georges Rouault, la peinture pariétale, Keith Haring et quelques autres…
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Des pinceaux, des couleurs et de toiles pour me remettre à peindre, c’est triste à dire, mais en ce moment je n’ai plus d’argent pour peindre ! La cerise sur le gâteaux serait une flûte Peul africaine, j’en rêve !
Que défendez-vous ?
Le principe du plaisir, le droit à la paresse et la paix !
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Peut-être que Lacan a souffert d’être mal aimé, pas moi ! De tout façon, pour donner et recevoir de l’amour il faut commencer pour s’aimer soi-même, quand l’amour répond à un sentiment du manque, ce n’est pas de l’amour et ça finit toujours en haine ! Il n’y a qu’a regarder ce qui se passe en France et en Europe en ce moment… Et même ailleurs…
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Je n’aime pas ni son cinéma ni le personnage, j’ai horreur des comédies et des mélodrames people ! Par contre, je l’admire en tant que clarinettiste. Pas de réponse donc !
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
L’essentielle… Je vous laisse deviner !
Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 16 janvier 2017.