Serge Demarchi, Exposition
L’ entrebâillement de la vie à l’affût
Franchir la frontière, modifier les manifestations visibles du monde, transformer sa perception demeure le travail majeur de l’art. Toutefois, à cet effort que celui-ci demande à ceux qui s’y engagent, beaucoup répondent, dans l’art contemporain, de biais. Demarchi à l’inverse l’affronte afin de montrer ce qui dans les paysages mystérieux permet un passage.
L’artiste reconduit le sujet-regardeur vers les défilés de son inconscient, en bloquant en lui les moyens de » se défiler » devant le » péril » (supposé) de la traversée proposée afin de lutter contre l’enlisement des jours. Et ce, même si l’être souvent se dérobe avec la même ambiguïté qu’une femme fuit en sa nudité.
La » jouissance » que provoque une telle oeuvre n’a donc rien d’un leurre mais d’une difficulté : car elle ne se laisse pas facilement apprivoiser. L’ « avènementiel » affirme donc une ambition autre que le simple désir de reproduction. Demarchi réinvente des vertiges, nous pousse hors de, s’approprie notre environnement pour faire franchir une frontière.Sa manière impeccable de peindre ouvre le regard à une sorte de vertige de la présence : paysages et portraits créent une angoisse mais aussi un plaisir par ce réapprentissage de la beauté.
La béance oculaire s’inscrit ainsi dans la peinture de paysage de l’artiste sous la modalité d’un mystère dans (de Cabourg, Paris ou Venise) différentes occurrences semblant sortir d’un autre royaume. Les reflets lumineux qui se concentrent sur le plan supérieur (ciel) font le jeu de l’entrebâillement de la vie à l’affût plus bas et donné le plus souvent par des touches de blanc.
jean-paul gavard-perret
Serge Demarchi, Exposition, Prieuré du Bourget-du-Lac, à partir du 13 novembre 2018.